J'entends un peu partout gronder la révolte contre la morale, les codes, les donneurs de leçons en tout genre. L'exaspération contre la bien-pensance, big brother and co. Cela va jusqu'au procès pour certains blogueurs qui, dit-on, "dépassent les limites". Et je m'interroge. Sur le principe de limite, fondé ou non. Car quoi de plus inspirant qu'un interdit?
Le code Hays, de triste mémoire, a généré le plus bel érotisme. Rappel des faits: en 1921, l'acteur Fatty Arbuckle est accusé du meurtre de la jeune actrice Virginia Rappe lors d'une partie fine qui a dégénéré. Fin des années folles, vent de panique à Hollywood. Avec le décès par overdose de nombreuses stars du muet, les studios tournent casaque. Terminées les beuveries sous les sunlights, place à la FAMILLE, LA MORALE, LE BIEN via le sénateur William Hays qui impose à l'industrie cinématographique un code de bonne conduite, code qui ne sera abrogé qu'en 1966.
Effondrement du rêve ? Bien au contraire. Anéantis dans un premier temps, les scénaristes et réalisateurs vont vite réagir et rivaliser d'inventivité pour tordre le cou à ce bout de papier. Et l'âge d'or d'Hollywood (1940/1960) fera le plein de chefs-d'œuvre tous plus ciselés les uns que les autres.
L'adultère? Backstreet
Le viol? Outrage
Échangisme? Haute pègre
Coucher avec un pasteur? Sadie Thompson
Fétichisme? toutes les œuvres de Von Stroheim, Von Sternberg et Hitchcock...
La vitalité, la créativité sont dopées par la censure. Et c'est dans les années 70, années de tolérance totale, que le cinéma sera le plus faiblard.
Alors je pose la question à mes potes blogueurs: sont-ils certains de vouloir une société qui les laisse libres de dire ce qu'il veulent? Ou ne sont-ils pas secrètement ravis de trouver un mur qu'ils ne cessent d'escalader?
Baisers de la pine'up qui sait qu'il n'y pas de talent abrasif sans chape de bien-pensance
PS: si vous voulez savoir ce qu'a été Hollywood au temps des pionniers du cinéma, lisez les mémoires de Gloria Swanson. Un must d'ingéniosité, d'égotisme et de vie. Actrice, productrice, femme d'affaire, amoureuse talentueuse, passant son temps à se tromper, ayant la lucidité rieuse de le reconnaître... oh oui, j'aurais adoré cette femme.