Non, ceci n'est pas une note sur le borgne à la retraite. Mais de retraite il en sera question: qui n'a pas contemplé lors d'un mariage-fête de potes-soirée au Cardinal-spé-salon du livre de Brive-la Gaillarde-soirée VIP Canal and co-boîte de nuit de la zep de Saint-Dizier, qui n'a pas contemplé, disais-je un brin goguenarde, le spectacle terrifiant de L'HOMME QUI DANSE SEUL? Et pas n'importe quel homme, l'homme d'un certain âge. Il est, mes amis, des époques cruelles: cinquante ans de jerk (quel nom déjà démodé!) ont réussi à ringardiser la virilité automnale. Car voir un homme mature se trémousser sur le dance floor est un spectacle au mieux pitoyable, au pire grotesque. Bizarrement, lorsqu'une femme danse seule elle ne dégage pas cette impression très gênante de hors sujet. Est-ce grâce à sa charge érotique plus naturelle, plus évidente, sa capacité à mieux prendre la lumière? Je ne sais pas. L'horreur intégrale se développe en plusieurs actes :
- L'octogénaire qui a passé sa jeunesse rageuse dans les caves de Saint-Germain des Prés: il ne se sent pas l'âge de ses artères et au moindre son de musique il se jette sur la piste en faisant claquer son dentier, rythme fiévreux de possédé, totalement sûr de son tempo, pensant être une réincarnation de James Brown alors qu'il évoque une vieille chauve souris faisant de la pub pour du viagra générique. Parfois, il vous invite à danser un rock et en profite pour vous ruiner le nez d'un coup de coude à contretemps, regard sévère à l'appui - c'est forcément vous la fautive.
- Le sexa-septua (comme le temps passe) qui a connu les riches heures Beatles/Stones: première option, il est un peu bourré et se traîne languissamment sur le plancher de la salle en grommelant les paroles de Sticky Fingers tout en hurlant comme un sourd "écoutez ce riff du siècle" à l'attention de l'âme charitable qui daignera le prendre pour un connaisseur. Il finit en général ivre mort à vomir sur cette époque pourrie (la notre) qui ne sait plus accoucher de chefs d'oeuvres. Deuxième option: il a usé ses fonds de culotte dans les bals populaires, est un fan de Sacha Distel/Richard Anthony et il se tortille en faisant de petits moulinets sporadiques avec ses poignets grassouillets, faisant passer Roger Moore dans Amicalement Vôtre pour Rudolf Noureev. Ce retraité deuxième option a au moins le mérite du ridicule joyeux, limite deuxième degré.
- Le quinqua post punk: soit il s'est arrêté aux Cure et il rejoint le sexa première option, se finissant dans les larmes à coup de tequila, soit il a pour idole Bowie/Brian Ferry et il danse à l'économie, l'air très concentré, un déhanchement par ci un jeté de bras par là, l'air suprêmement hautain, le regard se voulant absent, visage inexpressif et sueur aigrelette.
Dans tous les cas de figure je me tords de rire. Et je regarde les autres hommes qui ne dansent pas, soit parce qu'ils n'aiment pas cela, soit parce qu'ils ont pris l'habitude de faire tapisserie pendant leur jeunesse-boum-teppaz; ces derniers prennent alors une revanche éclatante sur leurs vieux amis noceurs: celle de contempler le nauvrage du vieux qui danse. Oui, celui qui leur a sucré Laetitia en 1963. Ou Ginette en 1952. Ou Muriel en 1979. Il est resté le même, le bougre. Hélas pour lui, hin hin hin yaaaarrrrrrhhh!
Pour conjurer l'obscénité d'un tel spectacle je propose de revenir au charme des danses d'antan, ces danses qui rassemblaient les générations dans le simple plaisir de bouger son corps. Tarentelles, menuets, sardanes, polkas piquées, quadrilles, venez sauver l'homme en détresse: sa solitude fait peine à voir sous les sunligths. Même la valse est la bienvenue, celle qui fait virevolter Burt Lancaster dans Le Guépard sans que se pose une seule seconde la question de sa dignité ou de sa grâce.
Ou encore je suggère d'inventer la danse du futur, une sorte de bacchanale martienne qui tiendra compte des articulations des seniors.
Baisers de la pine'up une rumba, beau brun?
Ps: un jeune, même s'il ne sait pas danser, est toujours charmant à regarder.
PPS: Ingalls ne danse pas -il est parfait.
Je fais partie de ceux qui sont incapables de danser sans un facteur peu glorieux: la boisson.
Et cette question qui ne doit pas hanter que moi le lendemain: est-ce que je danse mieux quand je suis désinhibé? Ou est-ce que je danse aussi mal, mais je m'en moque?
Quant aux "vieux" qui dansent, ce sont généralement ceux qui animent le mieux les soirées: plus de complexe, une vraie invitation à rire sur la piste, s'amuser, plutôt que de se demander si on aura l'air ridicule. :)
Rédigé par : Fredouat | 26 juin 2012 à 22:18
Moi, j'aime voir les vieux danser à deux. Pas seuls, ça me déprime totalement (sauf les femmes que je trouve jolies lorsqu'elles dansent seules à n'importe quel age). ET CESSE DE BOIRE!
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 26 juin 2012 à 22:53
Attention hein, je parle de boisson avec modération. Il ne sert à rien de danser pour quelqu'un qui a trop bu. :)
Mais pour revenir aux vieux: j'adore les mariages bien animés, où les jeunes vont se mêler l'espace d'une ou deux danses avec les papy/mamie.
Rédigé par : Fredouat | 26 juin 2012 à 23:33
Ah, mais ça, j'adore! j'adore voir papy et mamie fendre la foule pour s'enrouler l'un à l'autre! ou même participer à la farandole de la danse des canards! c'est, je le répète, la silhouette de l'homme qui danse seul qui me glace les sangs. Ou il s'y met parce qu'il est obligé ("on" lui a intimé l'ordre de faire le singe) et c'est un festif tristoune, ou il est dans une énergie transpirante pas terrible du tout (et en plus souvent salace). je veux au contraire réhabiliter des danses que chacun peut exécuter sans faire "vieux jeune".
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 26 juin 2012 à 23:45
J'ajoute: Ingalls danse, bien sur. rien qu'avec moi
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 26 juin 2012 à 23:53
Donc Ingall est non seulement parfait, mais agréable à regarder... ne jouez pas à l'euromillions... on ne gagne qu'une fois en général!
Officier, je devais sacrifier à ces manifestations qui collent plus ou moins un homme et une femme (en général) pendant l'éternité que duraient les valses, les slows et autres trucs maintenant ringards, sans doute. L'élégance du "spencer" de gala faisait pardonner les fautes de pas...
Rédigé par : adamastor | 27 juin 2012 à 00:30
Suis comme ça aussi je n'aime que danser enlacée avec mon homme.
Ou comme le dit adamastor ,le prestige de l'uniforme et le savoir vivre fait qu'il m'arrive de répondre aux invitations à la danse de salon .
Rédigé par : Elibéran | 27 juin 2012 à 07:56
Pascal Sevran, reviens, je t'en prie!
Rédigé par : Miss Up & Down (ex-UPDT) | 27 juin 2012 à 09:32
Je fuis la danse et la musique moderne comme la peste. J'ai horreur de ce genre de réunion où papy pousse la chansonnette (j'ai eu le droit à certaines d'avant 1914 qui étaient redoutables). Alors j'évite d'aller dans ce genre de réunion, tant que faire se peut.
Hélas, je vais y passer au mois d'août, il parait que ma présence est indispensable au mariage d'un de mes enfants. J'ai promis de rester... un peu.
Rédigé par : Le Nain | 27 juin 2012 à 09:38
@miss Up: ha ha ha! (pas sot). @Elib : bravo aux amoureux. @Le Nain: comme je suis surprise par votre attitude, je vous imaginais tellement bien en cloclo bondissant! Blague à part, je souhaite aux futurs mariés toute la joie du monde et je vous félicite en tant que parent.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 27 juin 2012 à 10:26
@Adamastor: officier and Gentleman... L'uniforme sauve bien souvent la mise, c'est vrai!
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 27 juin 2012 à 10:27
ILS DANSENT COMME LES BLANCS....
Votre billet me remémore une scène délicieuse.
En Afrique noire, la musique est omniprésente dans les villages. L'absence de portes ou de fenêtres facilitant le partage -( comme Franz Liszt le pratiquait en jouant près de sa fenêtre.).
La musique, là bas, n'est pas un loisir. Elle est omniprésente dans chaque geste du quotidien. Si bien que quand, européen, vous devez vous intégrer, le premier réflexe consiste à se tortiller en suivant le rythme. Alors qu'il faudrait simuler un moment de la vie, professionnel ou familial. Avant d'en arriver là, il faut "aborder" l'atavisme local...et absorber quatre à cinq fois ce que l'on définit comme "avec modération". -( Etre quintuplement modéré est exemplaire ! n.d.l.r )
Et un jour, sur la place du village, je vois un groupe de gosses se tortillant curieusement. Très appliqués, totalement déroutants...si bien que j'ai posé la question à une maman "surveillante". Elle m'a répondu, neutre au possible : ils dansent comme les blancs.
Reçu 5/5. Mais c'était absolument humain, désopilant et, comme toujours la-bas, l'amorce de...
M'accorderez vous ce collé-serré, chèèère madame ?
Rédigé par : L'amant-de-la-cousine-Bette | 27 juin 2012 à 11:45
J'imagine tellement bien la scène! Je me sens très maman "surveillante"... Un fox trot pour la route, cher ami. Ou une bourrée.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 27 juin 2012 à 12:18
pour une valse je vendrais mon ame au diable!
Rédigé par : isa | 27 juin 2012 à 15:54
@Isa: et moi je rêve de savoir la danser. J'ai un souvenir d'un salon du livre à Brive il y a une dizaine d'années: à chaque salon les auteurs se retrouvent tous pour une virée dans la boîte de nuit qui s'appelle Le Cardinal. C'est une sorte de rituel assez drôle. Chacun fait la foire, il n'y a pas bcp de place pour danser. J'avais bien aimé la soirée, mais je me sentais un peu "en dehors", même si j'étais bien entourée. Et puis brusquement j'ai vu un écrivain hors d'âge et très célèbre (paix à son âme) qui s'est levé pour aller se déhancher sur la piste. Il ne faisait pas ça façon deuxième degré, ce qui est mignon et entraînant. Il se croyait vraiment irrésistible. Comme il avait un certain pouvoir éditorial, une cour de flatteurs l'entourait. Et là, je me suis dit que mon sens du lèche-botte avait de sérieuses limites...
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 27 juin 2012 à 17:31
Encore une fois excellente observation par catégorie d'âge des "vieux-jeunes" dansant seuls au milieu d'une piste de danse à la mode.
Pour ma (notre)part en tant que sexa la danse à deux est un plaisir que l'on pratique à la moindre occasion. Il nous est arrivé d'enchaîner les series de danses toute une soirée.Une sorte de communion en préliminaire.
En ce qui concerne l'animation des mariages (jeunes/vieux) je suis du même avis que Frédouat.
Rédigé par : Gérard27 | 28 juin 2012 à 23:53
@Gérard: comme c'est joliment dit. Et comme j'aime l'expression "communion en préliminaire"
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 29 juin 2012 à 00:01