Avant de commencer les vraies vacances, celles qui vont enfin procurer une évasion profitable je me mets en condition: lecture en continu, 4000 pages de mangées en un mois et, signal des réjouissances à venir, j'ai relu l'ouvrage de Bryson : Motel Blues. C'est un de mes livres "doudou", ces bouquins qui ne sont pas forcément les meilleurs mais vers lesquels je reviens, aimantée par une joie gourmande.
Ce road book 1988 à travers les USA est d'abord très drôle, d'une drôlerie incisive, certes, mais non dépourvue de lucidité. J'aime quand Bryson constate que dans le Sud des USA, les Blancs détestent les Noirs mais vivent très bien parmi eux alors que le Nord, plus progressiste, milite pour l'égalité des droits tout en souhaitant que les blacks restent bien planqués entre eux.
A cette relecture, un détail m'a frappée. Bryson ne se gêne pas pour allumer les malls, le gigantisme des temples consuméristes - l'obésité de son pays. Il pointe sans cesse la fesse avachie, les beautés nubiles de son Iowa natal transformées dès la première grossesse en mémères adipeuses, ceux qui mangent des hamburgers avec la rapidité d'avaleurs de sabres. Il assaisonne ses descriptions de gros et grosses d'une joie déplaisante, limite maso. Car Bryson, qui a vécu toute sa vie d'adulte en Grande-Bretagne, est lui aussi obèse.
Y a-t-il plus malheureux qu'une femme grosse? Oui. Un homme gros. Mes copains gros se détestent et détestent leur engeance. Mes copines grosses tentent bien quelques régimes, mais un jour, elle lâchent prise et se regardent dans leur miroir avec un air câlin. Elles comprennent que cette chair, bien loin d'être rebutante, exige une sophistication et une structure particulière (belle chemise d'homme sur un maillot de bain échancré, veste très épaulée, et toujours, toujours, décolleté vertigineux). Je vois de plus en plus de jeunes femmes qui savent très bien tirer parti de leur surpoids, à la Rubens, à la Botero. Elle y puisent une coquetterie que j'adore, une grasse séduction de mamma sexy, une mise en valeur de leur peau télégénique, de leur chevelure lustrée.
Du côté des hommes, la graisse est synonyme d'échec, d'horreur, de gâchis sans nom. De laisser-aller contraire à tous les idéaux de la virilité. Les gros se haïssent bien plus que les grosses. Et pourtant... comme j'aime la bonne chair masculine, lorsqu'elle se porte fièrement, tel un plaisir de vie assumé... J'aime les ogres joyeux. Les culbutos, pas ceux qui ont le profil "petit cul gros ventre". Non, les vrais dont on ne voit plus la silhouette. Les Obélix élégants. Ceux qui épaulent leur veste, abusent des chouettes chemises, fuient le tee-shirt (le cou est la partie pas terrible des gros) et balancent insolemment leur masse sur la plage... les baloos au rythme sur, au derme doux.
Croyez-moi, ils sont rarissimes. Trop meurtris par la pression sociale, les obèses masculins fuient les bords de mer et allument leur congénères pour mieux se défendre : "J'ai droit de me moquer des vilains-j'en suis un moi-même". Quelle connerie.
J'ai aimé Elvis jusqu'au bout. On peut être princier et boudiné.
C'est le rythme qui fascine. Pas l'excès. Dégager quelque chose, jusqu'à la fin de ses jours... Dégager même... une forme de gloutonnerie curieuse, de sensualité loukoumesque... et là, les hommes ont beaucoup, beaucoup à apprendre des femmes.
Baisers de la pine'up qui ne perdra pas une miette de sa propre vie, grosse ou mince.
Etre gros, c'est être un paria. Je l'ai toujours été, et j'ai donc subi toute mon enfance exposé aux moqueries de mes petits camarades. De là mon côté ours, qui est bien que dans le cercle familial, ou dans l'anonymat de la toile.
J'évite donc les plages et me promène toujours en chemise et veste. Mais avec l'âge, je relativise, ce n'est plus important.
Rédigé par : Le Nain | 03 août 2011 à 14:53
Nous aurions dû être amis durant l'enfance. mes goûts esthétiques me portent très naturellement vers les "parias". Absolument pas par compassion, mais par instinct vital. J'aime, j'adore LA MASSE. Pas n'importe laquelle: celle qui s'assume avec culot et gentillesse. Celle qui pétille sans trop rugir.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 03 août 2011 à 15:00
Permettez-moi de vous rappeler un extrait d'Orly de Jacques Brel:
"... ces deux là sont trop maigres pour être malhonnêtes ...".
Heureusement que je ne suis pas rancunier !
Rédigé par : Dominique | 03 août 2011 à 21:20
Dominique, serais-tu blanc comme un cierge de Pâques?
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 03 août 2011 à 21:52
Indubitablement, pour les burkinabè* je suis bien blanc !...
Baloo est certes très élégant, mais où est Bali ?
* burkinabè: habitant du Burkina-Faso, invariable et en genre et en nombre.
Rédigé par : Dominique | 04 août 2011 à 10:52
On ne dit jamais "un bon maigre" mais on dit volontiers "un bon gros". J'aime bien.
Rédigé par : adamastor | 05 août 2011 à 13:27
Valérie: pourquoi avoir oublié Achille Talon ?
Rédigé par : Dominique | 05 août 2011 à 18:05
Talon est chasse gardée d'Ingalls!
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 05 août 2011 à 19:06
Alors Alceste ou Mr. Goulard le voisin de Marc Lebut ?
Rédigé par : Dominique | 06 août 2011 à 19:36
J'oubliais Demaesmaker !...
Rédigé par : Dominique | 07 août 2011 à 19:46