Pire que le parcours de golf, pire que la partie de pêche, pire que la chasse, pire que les études des mouflets, pire que le militantisme, il y a... le (à présent vieux) copain qui veut raconter à un auditoire indulgent COMMENT IL A ÉTÉ REFORME P4. Amis de ce blog à la Jeunesse Charmante, vous n'avez pas connu ce dialogue monologue passssssionnant et soyez-en bénis.
Petit rappel : de mon temps, les jeunes hommes devaient effectuer un an de service militaire. Certains regimbaient et tentaient de se faire porter pâles ; ils invoquaient la liberté, l'horreur des armes, les études, leur idéologie - bref, de sains alibis. Là où ça se gâtait, c'était APRÈS. Ils arrivaient à se faire réformer puis en parlaient ad libitum, pérorant sur leur héroïsme digne de Brassens... Et dès qu'un de ces glorieux coqs prenait l'avantage, je me mettais, toute proportion gardée, à vénérer secrètement les autres, ceux qui avaient fait leur temps d'armée sans broncher (genre Ingalls). Vous voulez voir comment c'était? Exemple :
Dîner de copains sympa, années 90... Appelons le héros "Jean-Paul". Jean-Paul a un peu picolé, ses yeux brillent d'excitation, il a envie de s'allumer un type de la tablée qui, trouve-t-il, a un peu trop de rayonnement. Il commence mezzo : " Ah ouais, t'as gagné ta régate des anciens de Supelec? Quelle connerie, ces trucs! Moi, j'ai fait un exploit, un VRAI EXPLOIT : j'me suis fait réformer P4. t'ention, pas P3, P4, chuis pas une tarlouze! j'ai pas demandé à mon père une dérogation, hein, toute façon il a pas un rond, mon père. Nan, je me suis fait un super cocktail de médocs que j'ai piqué à la fac de médecine et j'ai simulé la dépression... Horrible, j'ai failli sombrer pour de vrai. Ma mère a eu une de ces peurs! Je délirais sur le quai de la gare. Aux trois jours, y'zont dit qu'y'z en avaient jamais vu des comme moi. Un compliment génial, ils avaient l'air tellement cons ! T'aurais vu ces blaireaux... Y 'a même un débile qui pleurait parce qu'il était réformé... Quelle tâche! y disait que l'armée, c'était la chance de sa vie... pauv'mec! je remercie ma mère de s'être saignée pour qu'on aille à Louis Le Grand, ressembler à ce géranium, quelle pitié... Vous vous rendez compte, PLEURER parce qu'on ne peut pas faire l'armée! Hinhinhin... Allez, un coup de chablis, pas plus haut qu'le verre, hein... ça c'est vrai, les cons ça ose tout ! pleurer parce qu'on peut pas faire l'armée... Mauviette ! Pédé ! Toute façon, le monde est pourri ! Et chuis un pur! Allez, mettez un coup de Bach ça me fait chialer! Plus fort, nom d'une bite! Vous êtes tous des merdeux, des connards bien planqués qui obéissent comme des moutons! Vous connaissez rien de la souffrance ! J'ai failli crever pour me faire réformer, bande de NAZES! "
Je vous épargnerai la suite, mais le mépris que j'ai éprouvé pour cet homme a anéanti notre histoire d'amour. Brusquement, dans le silence gêné et consterné qui entourait ces propos, j'ai senti monter en moi un amour de l'armée, une haine des anarcho-réacs amoureux de leur stupide intellect, et une violente envie de vivre avec un homme pondéré. C'est à présent chose faite: merci, Ingalls, qui aime autant que moi regarder la légion descendre lentement l'avenue des Champs Elysées. Où est l'anti conventionnel ? Pas toujours là où on le croit...
Baisers de la pine'up qui a arrêté de vivre "avec des purs". Trop salissant.
ps : le pendant féminin du réformé p4 est la femme qui vous inflige son accouchement dans les moindres détails... Et encore, je ne connais pas plus pénible que le réformé P4. Eva Joly? Peut-être...
Moi tout va bien, j'ai juste fait ma journée JAPD, mais manque de bol je suis tombé dans la période où ce n'était pas encore mixte. Il faisait très froid ce jour-là à la base de Meyenheim, c'était en hiver, et j'aurais bien voulu que quelques visages féminins me réchauffent... le coeur!
Et aujourd'hui, raconter que j'étais encore dans les non-mixtes, je passe déjà pour un vieux...! Youpi ^^
Rédigé par : Jérôme Iby | 18 juillet 2011 à 05:29
Mère voici vos fils qui se sont tant battus.
Qu'ils ne soient pas pesés comme Dieu pèse un ange.
Que Dieu mette avec eux un peu de cette fange
Qu'ils étaient en principe et sont redevenus.
Mère voici vos fils qui se sont tant battus.
Qu'ils ne soient pas pesés comme on pèse un démon.
Que Dieu mette avec eux un peu de ce limon
Qu'ils étaient en principe et sont redevenus.
Mère voici vos fils qui se sont tant battus.
Qu'ils ne soient pas pesés comme on pèse un esprit.
Qu'ils soient plutôt jugés comme on juge un proscrit
Qui rentre en se cachant par des chemins perdus.
Mère voici vos fils et leur immense armée.
Qu'ils ne soient pas jugés sur leur seule misère.
Que Dieu mette avec eux un peu de cette terre
Qui les a tant perdus et qu'ils ont tant aimée.
Mère voici vos fils qui se sont tant perdus.
Qu'ils ne soient pas jugé sur une basse intrigue.
Qu'ils soient réintégrés comme l'enfant prodigue.
Qu'ils viennent s'écrouler entre deux bras tendus.
Péguy me prend toujours aux tripes, je ne sais pourquoi.
J'étais gonfleur d'hélices, métier militaire fort délicat que j'ai exercé un an.
Rédigé par : Le Nain | 18 juillet 2011 à 07:20
@Jérôme : tu n'es pas vieux, oh non. Début d'été, plutôt
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 18 juillet 2011 à 08:47
Amusante coïncidence, dans une très très récente note Môssieur Resse a fait une courte allusion au fait qu'il fut réformé P4 ...
Rédigé par : Dominique | 18 juillet 2011 à 12:18
Totale coïncidence. Suis certaine qu'Hervé ne s'en glorifie pas de façon chiante. Plus largement ce sont les tyrannies des "ni Dieu ni maîtres" que j'ai eu envie de titiller. Le courage existe aussi (et surtout) dans l'obéissance, ou plutôt dans la nuance
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 18 juillet 2011 à 14:02
@Dominique, oui Mossieur Resse en a parlé mais de façon discrète. Il a même dit dans une réponse à commentaire que le pire c'étaient les légionnaires et les paras. J'ai bien ri. J'ai tout de même pris la précaution de lui dire que j'avais presque 40 de légionnaire, de surcroît parachutiste. Il a répondu avec drôlerie en me disant qu'on s'en remettait très bien... c'est vrai, tout comme certains P4! Celui décrit par VPV est du genre horripilant... le héros de la soirée qui fait des flops à force de bêtise...
Rédigé par : adamastor | 18 juillet 2011 à 23:17
C'est étonnant. Vous nous faites la description caricaturale d'un gros con comme j'en ai jamais croisé même aux jours de sélection du service militaire. Et il vous a fallu cela pour rompre avec lui et embrasser les valeurs militaires? Je regrette de ne pas vous avoir connu avant, je vous aurais épargné cette fâcheuse soirée et on serait allé tous les deux voir les beaux militaires au 14 juillet.
Rédigé par : brindamour | 21 juillet 2011 à 19:27