Parfois, vous mettez le pied dans une région ou un pays et vous vous exclamez : "Bienvenue chez moi."
Ca m'est arrivé en Irlande, mais d'abord en Égypte. Tout a commencé avec la lecture des contes et mythologies de l'Égypte ancienne qui a décidé, lorsque j'étais gamine, de mon orientation post bac: je serai égyptologue !
La classe. Sauf que j'ai rapidement déchanté; les études d'archéologie sont arides et nécessitent une connaissance plus scientifique qu'historique. J'ai rendu ma copie après la maîtrise: je n'avais aucune des qualités requises pour devenir archéologue, trop peu de rigueur et un sens de l'esthétique manquant d'humilité. Alors que les glorieux professeurs s'extasiaient sur un misérable tesson paléochrétien trouvé sur les bords de la nationale 7, je rêvais de drapés élégants, de statues d'albâtre et de temples engloutis. Cancre courageuse, j'ai tout de même suivi des cours d'épigraphie hiéroglyphique, suffisamment pour vous dire que le complément d'objet direct dans cette langue imagée se nomme le Sedjemnef, et que le mot pour signifier l'amour s'écrit sous la forme d'une alouette. Suffisamment aussi pour certifier que l'Égyptien est blagueur (hiéroglyphes truffés de calembours sur les temples, tags avant l'heure.)
J'ai foulé pour la première fois le sol égyptien il y a 26 ans. Jeunette et bourrée d'idéaux, j'avais envie de crier de bonheur. J'ai tout aimé (sauf la bouffe). Avec la naïveté des 20 ans, j'ai arpenté le pays, inconsciente des dangers et riant aux drôleries des hommes.
J' y suis retournée une dizaine de fois, dont deux sur des chantiers de fouilles. J' y ai attrapé des amibes qui ont fait de mon estomac une réserve d'anticorps digne de l'appareil digestif d'une autruche. J'y ai vécu une histoire d'amour aussi brève que jolie.
Je suis incapable de porter un jugement sur la situation égyptienne actuelle, encore moins sur celle de son évolution à moyen terme.
Mais je m'associe à la première de classe de notre promo 1988 : Il n'y a pas de situations statiques en ce bas monde, comme disait mon cher Professeur Philippe Bruneau de Paris IV-Sorbonne. Que Dieu ait son âme.
Baisers d'une pine'up qui est tombée amoureuse de Sésostris III
et d'Hatchepsout,
d'Alexandrie et d'Assouan
avant de trouver une part d'elle-même dans les déserts roses d'un pays étonnant.
Ps : Au sixième jour d'une écrivain que j'admire, Andrée Chédid et qui vient de mourir. A la peine de ses amis égyptiens, que j'ai eu la chance de rencontrer.