On m’a tout donné, on m’a tout repris ? Oui. Mais non. Personne ne pourra me reprendre notre décennie. Lorsque je suis à terre, je plonge dans nos fluides souvenirs. Mon chéri, mon bien-aimé, rappelle-toi quand je disais : « On est un couple chef-d’œuvre, hein ? » Tu gloussais, tu éclatais de rire en faisant briller tes yeux. Tu es EXACTEMENT l’homme qu’il me fallait et j’ai la certitude d’avoir été EXACTEMENT la femme qui te fallait. Intuitif, analytique, corporel, élégant, solitaire, d’une grande politesse tout en te méfiant de la notion de classe ou de code… Nous avions la même vision de la vie, le même refus calme et têtu de la norme, du corporatisme. Etouffant dans le trop religieux, étouffant encore plus dans le dogme laïc bien-pensant, notre précieux refuge dans le couple fut une sorte de révélation : c’est sans doute le seul exemple que nous avons vécu de parfaite égalité, un mot qui pourtant ne plaisait ni à l’un ni à l’autre ; pas de dominant-dominé, pas d’abrasion, pas d’excès mais pas non plus de morne ennui… Les sensibilités s’accordaient dans les lectures mutuelles – tu es un de ces hommes bénis qui aiment la fiction, le roman -, les films, le design. Tu m’as donné le sens des volumes, je t’ai apporté la couleur. Sur un socle câlin nous avons bâti un univers de respect drôle, vif, réactif. Un univers d’une rare cohérence. Une partie de moi est mutilée à vie. L’autre est enrichie à vie.
A présent… Il faut survivre – je sais faire. Je remercie les témoignages d’amitié que j’ai pu recevoir. Je sais à quel point il est difficile de réconforter une personne qui n’est pas dans la PEINE, mais dans la SOUFFRANCE du deuil. Certains m’ont déçue. Un mail soi-disant bienveillant qui disait en substance que mon bonheur bloguesque prêtait à la moquerie, mais qu’on compatissait à mon chagrin présent « et je suis là pour toi, si tu veux etc. » A cette personne : je considère que la plus belle amitié se voit dans le bonheur, plus que dans le malheur. Il y a des gens qui ne peuvent supporter les gens heureux et qui accourent comme des charognards pour vous faire exister moyennant votre tristesse. Jamais je n’ai été ainsi et jamais je ne supporterai cela. Ces gens-là, je ne veux pas les voir et je ne les verrai plus. Je ne m’embarrasse pas de paumés envieux. Ce qui m’a fait le plus de bien : aller assister au mariage de mon cousin, toucher du doigt l’amour du jeune couple et m’en repaitre pour récupérer l’énergie vitale. Donnez-moi votre bonheur, en perfusion, en masse. Ne me donnez pas une fausse complicité de personne qui souffre, je la rejetterai de toutes les forces.
Mon Ingalls, mon amour, je sens tes longs bras contre mon corps, j’entends ta voix irrésistible, sourde et grave, virile et rien qu’à moi. Je vois ton visage marqué, tes lèvres pleines et tes fossettes… et je tiens miraculeusement debout.
J’embrasse les cousins Guillaume et Dorothée et je les remercie pour leur tendre délicatesse. Longue, longue vie aux mariés - qu’ils soient heureux jusqu’à la fin des temps !
Ca c'est de l'amour doublé d'une extraordinaire force de caractère. Bravo.
Rédigé par : adamastor | 19 juillet 2013 à 17:50
je ne suis pas certaine d'utiliser le mot "force" pour moi en ce moment, mais je suis très touchée par votre compliment. Je crois que vous êtes militaire. Avec François, on aimait bien regarder le défilé du 14 juillet, surtout la légion et sa lente cadence. je n'ai pas dérogé à la règle, je l'ai regardé seule. ce fut bizarre.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 19 juillet 2013 à 19:03
Oui, j'étais militaire, presque 40 ans dans la Légion. Malgré cette longue habitude je regarde toujours le défilé avec émotion. Pour le reste... N'empêche qu'à mes yeux vous êtes une femme hors du commun et même si vous trouvez que "force" est inadapté je pense qu'il y a en vous quelque chose de grand qui vous fera vaincre les épreuves. Quasi anonymement, beaucoup de gens ici vous aiment. Je suis du nombre.
Rédigé par : adamastor | 19 juillet 2013 à 21:40
les memes mots qu'adamastor....pour la deuxième fois mon village a été choisi par la Légion de Castelnaudary (a 19km), le 14 mai, 56 jeunes militaires ont avec fierté, émotion et gravité preté serment à la Nation et coiffé le Képi Blanc. J'y suis allée toute seule au milieu des autorités, ancien combattants et familles...
Rédigé par : isa | 21 juillet 2013 à 11:37
Bravo Isa
Rédigé par : adamastor | 22 juillet 2013 à 11:39