L'été est là et avec lui son cortège de livres. Son armée devrais-je dire tant je dévore sans relâche les récits qui me renforcent. Jacques Coeur m'a donné envie de relire Les rois maudits. Des nuits d'insomnies peuplées de convulsions franco-anglaises, de brutes cupides et de rois faibles. Les derniers Capétiens directs, hormis Philippe Le long, furent des rois navrants. Empoisonnements et égarements de l'Histoire au profit du romanesque, seul émerge de ce pouvoir si décevant pour celui qui le possède Edouard III Plantagenêt, petit-fils de Philippe le Bel et fantastique roi d'Angleterre. Il nous a ruinés pour un siècle. Sa seule erreur? Avoir labouré la France en semant la terreur au lieu de corrompre les Français avec finesse pour mieux les dominer. Bouter l'Angloy hors de France fut doublement une obsession après de tels carnages. La saga de Druon est toujours aussi trépidante, miroir de la logique politique constamment mise à mal par l'absurdité humaine. A chaque fois qu'une sage solution se profile, elle soulève une foule d'irresponsables qui vont jeter toutes leurs forces pour la contrecarrer.
Petit saut de 50 ans dans le temps pour aborder Le crépuscule des Rois de Catherine Hermary Vieille. Une trilogie qui démarre au dernier Plantagenêt direct, plonge dans la guerre civile anglaise des deux Roses et s'épanouit sous Henry VII et Henry VIII Tudor. Une merveille de construction, digne des Druon. Le crépuscule des rois est plus un livre sur leurs compagnes, sur ces reines : Marguerite d'Anjou, Elizabeth Woodville, Margaret Beaufort, Bessie d'York et toutes celles qui suivent forment une galerie de portaits sublimes. Tandis qu'Anglais et Ecossais, bien loin de l'étiquette à la Française, s'écharpent de la manière la plus brutale qui soit, les femmes tissent les alliances. Défont le jeu. Construisent lentement la carte du pays. A cet égard toute la partie racontant la vie d'Henry VII Tudor, issu de la branche Lancastre, et d'Elizabeth, fleuron de la branche d'York, montre à quel point le pari était loin d'être gagné. Probablement est-ce le couple le plus attachant de toute cette saga. Le plus policé, le plus aimé à juste titre, le plus soucieux de son pays. Aux horreurs que le roi et la reine vécurent enfant, chacun dans le camp ennemi, succède une forte politique de réconciliation et - enfin! - d'enrichissement de l'Angleterre. Cela ne durera pas, Henry VIII arrive en embuscade en 1509 et ses 40 ans de règne anéantiront le patient travail de son père. L'Angleterre redevient suiveuse, derrière le royaume d'Espagne dont c'est l'apothéose, derrière la France qui trouve dans la Renaissance le paroxysme de son raffinement, l'essence même de son alliage esprit chevaleresque/don pour le luxe. Henry VIII ne pense qu'à se marier et à guerroyer avec la France là où son père, secondé par le cardinal Wolsey, comprenait à la fin de son règne l'importance des grandes explorations. Henry VIII se laisse gouverner par son nombril et ruinera le pays, sans politique expensionniste remarquable, sans arriver au talon des souverains espagnols ou même français. Catherine Hermary Vieille a tout pour nous raconter cent ans d'histoire anglaise riche en luttes intestines: la rigueur d'une archiviste qu'elle est, la clarté d'un beau talent narratif et un sens des dialogues totalement juste. Cette combinaison d'atouts est rare: soit les historiens ont un vilain style, soit ils ne savent pas équlibrer leurs chapitres, soit leurs dialogues tombent à plat. Chez Catherine Hermary Vieille, l'équilibre entre culture et transmission de cette érudition est aussi subtil que bien dosé. Un peu à la Zweig elle s'attache à suggérer combien la grandeur n'a pas grand chose à voir avec l'intelligence; son personnage le plus touchant est l'avant-dernière épouse d'Henry VIII, l'écervelée Katherine Howard qu'elle traite avec une tendresse toute particulière, à la Marie-Antoinette. Cette jeune fille sacrifiée et décapitée à 20 ans meurt avec infiniment plus de bravoure que tous les roués politiciens envoyés par le roi sur le billot. La mort, elle l'apprivoisera en une nuit. Le passage consacré à cette femme enfant est très émouvant. Une sotte peut devenir grandiose. Un fin stratège peut s'avérer pitoyable. Il n'y a pas de vraies règles humaines. Il y a des trésors que chacun découvre dans l'urgence, au gré de sa bonne ou mauvaise nature.
Baisers de la pine'up qui repart dans Zweig (Mary Stuart). Du déjà lu, mais comme c'est merveilleux de relire de tels ouvrages.
Peu de nouvelles lectures en ce moment, des relectures. Le cycle d'Ogier d'Argouges de Pierre Naudin, qui vient de mourir. Mon Dieu que c'est réaliste, c'est d'un pessimisme noir, mais c'est plus près de la réalité du Moyen-Age que tout ce que j'ai pu lire avant ou après.
Pour le reste, polar. Américain, arsenic et vieilles dentelles anglaises n'étant pas ma tasse de thé, à part Elisabeth George, mais elle est américaine.
Rédigé par : Le Nain | 07 juillet 2012 à 08:42
...Un pied contre mon coeur."
Indéfinissable.
Ces superbes livres d'histoire de l'Histoire. Bonheurs à portée de main.
Mais par période, sans que je puisse comprendre pourquoi, je suis amené à envoyer courriels, mais souvent courrier, même à des proches assez jeunes.
Générer sourires et "liberté dans la tête."
Je reviens régulièrement sur Rimbaud. Quelques vers...
Tout le monde me semble comprendre.
Heueux week-end à vous !
Rédigé par : L'amant-de-la-cousine-Bette | 07 juillet 2012 à 09:44
Je ne suis pas hélas très sensible à la poésie pure. je lis peu de poèmes. J'aime avant tout, passionnément, qu'on me raconte une histoire. Et que la poésie irrigue une narration
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 07 juillet 2012 à 11:33
Suis je si bête ? -( mais oui, mais oui ! n.d.l.r )- pour m'être aussi mal exprimé.
Votre papier tient lieu de réponse.
Rimbaud ne laisse pas de poêsie. Ce mec complètement chtarbé, comme dit ma petite voisine qui me plonge dans un tracas pas possible pour me remémorer comment nous définissions Rimbaud à l'époque où ceux qui disaient "émotionné" en lieu et place d'"ému" déclenchaient des haussements de sourcils, laisse de l'infini, à mon sens.
Mais, sans sombrer dans la basse flagornerie,je suis tombé dans le piège de votre journal. On s'y sent parfaitement bien.
Quelque part, les esprits libres qui viennent y flâner laissent de délicates empreintes.
La poêsie, ce n(est pas Rimbaud ou Verlaine
ou la toile d'araignée sous la pluie. C'est vous, et votre élégance extrême à faire partager vos bonheurs.
C'est d'un pénible...
Rédigé par : L'amant de... | 07 juillet 2012 à 23:52
Je suis heureuse que vous vous sentiez bien ici. Élégante? cela dépend des jours. Mais s'il y a un mot que j'aime, moi l'amoureuse de la ville, c'est le mot "urbanité".
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 08 juillet 2012 à 17:51