Chers amis, si vous n'avez pas lu d'ouvrages de Bill Bryson, novembre et ses froidures semble le bon moment pour entrer dans son univers qui mélange ironie, efficacité BBC et analyses sociétales.
Le premier ouvrage de Bryson traduit en français s'appelle Motel Blues, coll Payot/poche. (discret coup de lèche-botte aux éditions Payot : vos publications sont souvent excellentes)
Cela commence ainsi : "je suis né à Des Moines, Iowa. Je sais, ce sont des choses qui arrivent..."
Bryson, un Américain très baby boomer, version alerte et pochetronne, a fui son middle west natal pour atterrir en Angleterre où il se maria et travailla de nombreuses années à la télévision. Un jour, son père mourut. Bryson retourna au pays, prit la vieille chevy paternelle pour effectuer un road movie hilarant à travers les US, bien plus fouillé et riche en enseignements que le ton léger le laisse supposer. Motel Blues est un scanner de l'Amérique, celle des blaireaux, des villes du sud, des parcs d'attraction, des splendeurs du Wyoming et des métissages plus ou moins tolérés. C'est aussi une déclaration d'amour à un père, et le constat d'une enfance joyeuse, à l'âge où on ne peut s'empêcher de revenir sur ses pas.
Le deuxième livre de Bryson, Nos voisins du dessous,
raconte son épopée en Australie. Bryson picole toujours autant, a peur des bêtes, se perd dans Canberra et fait mourir de rire Ingalls.
Bryson est typiquement l'auteur qui peut rassembler mes amis : Caritate et Resse+Depoil aimeront sa verve, son sens de l'Histoire intriguera Le Nain, ou GG, Helenne ou encore Elek, le principe du livre "road movie" fera les délices de Gérard et Heleanne (qui sont souvent sur les routes), et Linda, Nadia, Lôtre, Fred, Gilles, André, Patricia et tous les autres seront sensibles à l'érudition qui s'épanouit dans l'humour. Peut-être l'avez-vous déjà lu.
Si ce n'est pas le cas, je vous envie.
Son dernier bébé vient de sortir en français : Shakespeare, l'anti biographie (Payot).
Je viens de le commencer : je retrouve son sens comique qu'il manie d'autant mieux qu'il a effectué un solide travail d'archiviste en amont. Bryson utilise le subterfuge de Yourcenar dans "Archives du Nord" (pour moi, son meilleur livre). C'est à dire utiliser le prétexte de la biographie d'un individu (soi-même chez Marguerite, Shakespeare chez Bryson) pour narrer l'histoire d'une époque. La comparaison s'arrête là car Bryson n'a aucune ambition littéraire, mais le procédé est identique : Bryson n'évoque le barde de Stratford que pour nous raconter la période élisabéthaine. On apprend une foule de détails : pourquoi, dans les temps anciens, les riches s'habillaient-ils en noir ?
Le premier qui trouve reçoit mes baisers virtuels (et n'allez pas tricher sur google !)
Une autre anecdote va intéresser Elek : on parle de société moderne procédurière ; eh bien sous le règne des Valois / Tudor, il y avait un nombre incroyable de procès : le mari furieux qui n'avait pas touché la dot de son épouse allait râler chez le bourgmestre, les amendes pleuvaient et la société était rackettée en permanence. Un exemple : si vous vouliez inviter des amis à souper en 1565, il fallait demander l'autorisation au bailli. Pourquoi, à votre avis ? Ce n'était pas pour engraisser l'Etat (encore que...) mais pour contrôler la venue d' inconnus dans un village because terreur constante de la peste noire qui ravagea l'Europe durant le Moyen Age et la Renaissance. Il est bon de vivre ici et maintenant, hein GG ?
Baisers d'une pine'up qui aime son siècle. De toute façon, pas le choix, épilepsie oblige, j'aurais été brulée pour sorcellerie, en ces temps oubliés.
Peut-être que la pine'up aurait aidée à faire avancer les choses et que Van Gogh l'aurait remercier, on se sait pas!!! Et du coup, je ne me serai pas fait allumer par Caritate:)!!
Rédigé par : Sophie | 30 octobre 2010 à 10:57
Héhé... Vous avez raison,Sophie, je donne mon avis tout le temps. Mais un blog, c'est un peu fait pour ça. Contrairement à un essai ou un roman, qui sont des exercices de suggestion pour laisser au lecteur la possibilité de se faire un jugement, le blog est, lui, un défouloir. Celui de Caritate est excellent, et la femme est très attachante (j'ai eu la chance de la découvrir dans la vraie vie).
Pour le noir, puisque personne se lance, la raison est toute bête : une belle couleur noire était très difficile à fabriquer; elle nécessitait des teintures successives et compliquées. Voilà pourquoi quand on trouve des portraits d'inconnus habillés en noir, on peut en déduire qu'ils avaient un peu d'argent. les couleurs "pauvres" étaient le beige, les fauves (qui sont la base automne-hiver de la haute couture cette année !) Comme vous le constatez, j'ai la mémoire de l'inutile... Bonne journée !
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 30 octobre 2010 à 11:23
Quitte à lire quelque chose sur la fin de la Renaissance, autant lire le Journal de Pierre de L'Estoile, qui narra petits et grands évènements durant les règnes d'Henri III et Henri IV. C'est marrant comme tout et en cas de cafard, c'est radical. En plus, c'est gratuit sur Gallica.
Le coup du bailli me paraît être extrêmement bizarre et la peste n'en est certainement pas la cause. Demander l'autorisation au bailli d'inviter des amis qui habitent la même ville indemne de peste n'est pas crédible.Si il y a la peste en ville, les gens ne s'invitent pas. Je pense qu'il y a là une raison politique ou religieuse, surtout religieuse à une époque où les Papistes sont mal vus en Angleterre.
Rédigé par : Le Nain | 30 octobre 2010 à 16:37
Merci Le Nain pour Pierre de L'Estoile, qui ira enrichir les mémoires de Pepys. Pour le bailli et les demandes, ce n'était pas dans les villes touchées par la peste mais comme l'épidémie sévissait souvent, c'était, selon le livre de Bryson, pour tenter de contenir les risques d'infection. Je copie l'extrait, à méditer (ou contrer): "presque tous les aspects de la vie faisaient l'objet d'une contrainte légale. Au niveau local, vous pouviez vous voir infliger une amende pour avoir laissé vos canards divaguer dans la rue,pour avoir détourné du gravier appartenant à la ville, ou pour avoir reçu un invité sans autorisation écrite du bailli. Notre toute première rencontre avec le nom "Shakespeare" est liée à une transgression de ce genre consignée en 1552. En l'occurrence, il ne s'agissait pas d'une simple tracasserie de la part de la municipalité ; cela relevait d'une réelle inquiétude, la peste ayant déjà sévi plusieurs fois dans cette ville".
Quant aux rapports entre protestants et papistes, (Élisabeth faisant figure de protestante "modérée"),il y a un chapitre très intéressant à ce sujet.
Ps : j'admire votre culture historique
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 30 octobre 2010 à 18:50
Sophie, loin de moi l'idée de vous allumer ! Mais je suis toujours prête à défendre la pine'up bec et ongles !
J'ai appris plein de choses aujourd'hui (pas qu'aujourd'hui d'ailleurs !)
Rédigé par : Caritate | 30 octobre 2010 à 19:17
C'est donc que les contraintes sont plus fortes en Angleterre que dans le Royaume de France. Le voyageur se voyait fréquemment demander un certificat sanitaire de la ville d'où il venait en cas de peste, mais cela n'allait guère plus loin. Mais il est vrai qu'en 1562-1564, il y a une forte épidémie en France, et qu'elle est en Angleterre en 1565, ceci explique probablement cela.
Pour le reste, il n'y a rien à admirer, je suis tombé dedans tout petit, et j'adore ça...
Rédigé par : Le Nain | 31 octobre 2010 à 02:53
"La mémoire de l'inutile.." L'inutile existerait donc ?
Rédigé par : Caritate | 01 novembre 2010 à 07:01
Ah oui, l'inutile existe... pour preuve, Caritate, mets-moi sous les yeux un Match ou un Voici, j'enregistre ses infos pour toujours. Ma mémoire est encombrée d'inutile, elle jongle entre la personnalité un peu space de Jacques Stuart et le palmarès affectif de Clooney (un truc essentiel, non ?). A côté (ou à cause) de ce fourmillement, impossible d'apprendre la règle de trois...
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 01 novembre 2010 à 10:33
:-) un peu de vocabulaire dans ton sens
judiciarisation et quérulence ;-)
l'avantage pour les gens de droit et de robe avec ce retour (recours) croissant à la justice, c'est qu'on est pas au chomage !
Rédigé par : elek | 04 novembre 2010 à 16:50
Des gens comme toi, cher Elek, sont toujours actifs ! #tribunaldesflagrantsdélires #souslarobeaustèredelajustice #voirtonblog
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 04 novembre 2010 à 20:44