Bien. Je traverse une période de féminisme virulent mais je vais prendre sur moi. Un homme de l'art, Hervé Depoil (voir adresse de son blog ds articles cinéma précédents) désirait un menu cinéma français années 50 (ah Misogynie, tu régnais en maîtresse comique dans un élan pré- Houellebecq !) Hervé m'a demandé du Grangier
Etudions ce sympathique metteur en scène et tt d'abord, citons-le ("Flash-back", 1977) :
"les cinéphiles de l'an 2000 découvriront peut-être, hors des grands classiques admirés et admirables, quantités de "petits" films sans autre prétention que celle de distraire. On commence à se rendre compte que c'est dans les films de série B que l'on retrouve un reflet exact de l'époque à laquelle ils ont été tournés... Un jour on vous rendra justice, Boyer, Lacombe, Chenal, Duvivier, Christian-jaque, Berthomieu, Allégret, Decoin, Pottier, Daquin, Pierre Prévert... Vous me direz que la gloire posthume vous n'en avez rien à foutre, moi non plus".
On commence par du lourd, du très lourd : Le cave se rebiffe (Grangier 1961)
Impossible de ne pas encenser Audiard son argot sophistiqué et délirant. je m'abstiens de vous dévoiler l'histoire, le film repasse sur nos écrans dix fois par an.
Juste ce florilège audiaresque pour se faire du bien :
- Parce que j'aime autant vous dire que pour moi, Monsieur Eric, avec ses costumes tissés en Ecosse à Roubaix, ses boutons de manchette en simili et ses pompes à l'italienne fabriquées à Grenoble, eh ben, c'est rien qu'un demi-sel. Et là, je parle juste question présentation, parce que si je voulais me lancer dans la psychanalyse, j'ajouterais que c'est le roi des cons... Et encore, les rois, ils arrivent à l'heure...Parce que j'en ai connu, moi, mon cher Maître, des Rois... Et pis pas des p'tits... Des Hanovre... Des Hohenzollern... Rien qu'du micheton garanti croisade... Mais vous m'voyez-là, maintenant, mais moi, j'ai pas toujours tenu un clandé !... Vous avez pas connu la Rue du Chabanais... Soixante chambres !... Et y z'ont filé tout ça aux P'tites Soeurs des Pauvres !... Quand j'y pense, tiens... Alors, c'est pour vous dire que votre ami Éric, ses grands airs, y peut s'les cloquer dans l'baba !... - L'honnêteté, ça se paye. - L'éducation, ça s'apprends pas. - Dans un ménage, quand l'homme ne ramène pas un certain volume d'oseille, l'autorité devient, ni plus, ni moins, d'la tyrannie !... Et l'autoritaire, un simple emmerdeur prétentieux !... - L'affaire redeviendrait possible si on pouvait faire contrôler nos sterling par un spécialiste... - Je connaîs ton honnêteté, mais je connais aussi mes classiques. Depuis Adam se laissant enlever une côte jusqu'à Napoléon attendant Grouchy, toutes les grandes affaires qui ont foiré étaient basées sur la confiance... - Faire confiance aux honnêtes gens est le seul vrai risque des professions aventureuses - Entre nous, Dabe, une supposition... Hein, je dis bien une supposition, que j'ai un graveur, du papier, et que j'imprime pour un million de biftons. En admettant, toujours une supposition, qu'on soit cinq sur l'affaire, ça rapporterait, net, combien à chacun ? - J't'enverrai un gonze dans la semaine. Un beau brun avec des petites bacchantes. Grand. L'air con - Dans la vie, ne pas reconnaître son talent, c'est faciliter la réussite des médiocres. |
No comment. Un banal film série noire devient au final un festival baroque.
Mais, dieu me tripote mon cher Depoil, il existe un Grangier moins connu qui en vaut la peine. Et même sacrément !
Quoi ? Luis Mariano ? Un nanar, donc ! Et bien pas du tout."Histoire de chanter" (1947) est un truc loufoque avec aussi (excusez du peu) Julien Carette (miam) et Noël Roquevert (re miam). oui, il y a des moments un peu datés dans ce film mais le scénar est drôle :
Nice. Deux hommes (un chirurgien et un épicier) sont furieux : leurs épouses se pâment pour un chanteur de charme qui leur fait tourner la tête. Pour se venger le chirurgien (Roquevert) greffe les cordes vocales de Mariano à l'épicier (Carette). Mariano se retrouve avec la voix parigote de Carette et inversement. poilade. A noter l'humour de Mariano qui se prête à cette pantalonnade alors qu'il est au sommet de sa popularité, chapeau l'auto-dérision.
A voir pour le caractère très original de cette comédie.
Un p'tit Mocky ?
ça date de 67 mais c'est furieusement 50 avec l'équipe Francis Blanche-Serrault-Rich, c'est Mocky au sommet de sa verve (avec "Un drôle de paroissien"). Après, le bâclage prédominera, hélas ds l'oeuvre de ce metteur en scène.
Et puis tous les Jacques Becker (petit faible "Edouard et Caroline" avec Daniel Gélin, pureté parfaite de la satire de moeurs)
Et bien sûr les Guitry avec le meilleur acteur français : MICHEL SIMON
J'espère, Hervé, vous avoir fait plaisir
C'est super bien écrit, c'est truculent à souhait, c'est féministe juste comme il faut (bon, ça va... ;o) Merci ! J'adore encore plus le cinéma de Grangier quand c'est avec distance qu'il est raconté... En effet, c'est le cinéma d'une époque que je n'ai pas connu et dont je ne suis pas nostalgique par procuration. Cela représente un cinéma "jouissif" à souhait de part sa simplicité assumée. Série B peut-être, mais pas nanard pour un sou ;o))) Et je vais de ce pas me précipiter sur "Histoire de chanter" que je ne connais pas. Ahhh bien sûr, vous avez oublié mon "vide-cerveau" préféré sur des dialogues d'Audiard, quand même...Mais je vous comprend, l'œuvre est immense !
Rédigé par : Hervé | 03 décembre 2009 à 01:07
Merci Hervé : j'adore, comme vous, cette simplicité (très dure à atteindre), cette humilité aussi qui est la marque de nos artistes cités. Voulez-vous une autre selection ? sur ma lancée je peux en trouver d'autres ! (guitry et Duvivier recèlent des trésors)A+ !
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 03 décembre 2009 à 17:32
Ah oui, volontiers ! j'ai entendu il y a quelques jours Jacques weber dire qu'il avait mis très longtemps à découvrir le talent de Claude SAUTET. je suis très fan de beaucoup de ses films et me suis dit que les nouvelles générations mériteraient de découvrir les "jeux d'acteurs" magnifiques que ses films montrent cela vous dirait ? je serais très curieux de lire votre appréciation de ce cinéma là ;o)
Rédigé par : Hervé | 03 décembre 2009 à 22:57
Eh bien c'est reparti dans les archives... avec un petit bon du côté 70 !
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 04 décembre 2009 à 00:07