Marche républicaine.
Y Aller ? Ben oui, SE POSER LA QUESTION. Le côté Luchini qui sommeille en soi, le coté qui n'aime pas qu'on lui dicte sa conduite, qui se méfie des "bien sûr", "absolument", "évidemment". Avoir peur de la récupération. Puis se dire que c'est irrécupérable, en tout cas dans sa tête. Se réveiller songeuse après une belle fête. Allez, oui, go. Même si on ne va pas faire semblant, on ne lisait pas Charlie Hebdo et on n'appartient pas à la famille des libertaires. Plutôt à celle des individualistes qui aiment d'abord se moquer d'eux mêmes avant de se ficher des autres.
Et puis on n'aime pas la foule, sans être agoraphobe, les grand-messes, c'est pas notre sensibilité. On ne sait pas très bien communier. Communiquer, oui, communier... Limite méfiance... Obligation d'une religion d'enfance, la communion, obligation de la jeunesse, la communion des concerts, tout le monde s'aime, c'est quoi tout le monde... Notre truc, c'est le mélange, les différences. Les multiples originalités.
Remballer ses scrupules et ses questions, relever la tête, dire z'y go parce que C'EST TOI QUI LE DECIDE ET PAS LES AUTRES. ET QUE TU VAS ALLER TE FONDRE DANS LES AUTRES EN RESTANT TOI. Rejoindre avec Super Pote Boulonnais les potes chéris à Bastille. Parce qu'ils sont spécialement BONS, de bonnes natures bienveillantes et douces. Style à ne pas ordonner ou régenter la vie des autres. Style spontanés. Style curieux. Style Montaigne et La Boétie.
14h 30. On est là, tous les 7 à Bastille. Beaumarchais vers République. La foule dense, plutôt silencieuse. Déterminée. Tous les âges ; pas tous les milieux, ce serait mentir ; en tout cas pas sur ce trajet. Commencent des heures de marche. La fierté grandit avec la dignité palpable. Sourires timides. Joues rosies par le froid. Tout petit sentiment d'appartenance qui s'agite, oh, petit, mais réel. On ne peut plus bouger, on prend des chemins de traverse... Les pancartes fleurissent dans une sorte de poésie unique à chacun. Oui oui, ce sont les "Je suis Charlie" qui dominent, dans toutes les langues, DANS TOUTES LES LANGUES. Et puis, le soleil couchant sur la place de la Nation. Et puis, ces scènes si insolites et si fortes des cortèges de police acclamés par la foule, acclamés par les jeunes. Et là, se dire qu'une forme de miracle se produit : c'est un journal soixante-huitard massacré qui illumine en ce jour le courage des policiers. Tout un symbole. Celui d'une France qu'on aime, avec ses paradoxes et justement, ses nombreuses UNICITES.
Nous sommes.
Nous sommes des enfants des deux. De l'impertinence comme de l'ordre. De l'insolence comme de la protection. Réunis.
Je n'y étais pas, et je ne suis pas Charlie. Qu'un gouvernement appelle à manifester plutôt que d'agir me laisse légèment pantois. Il y en a trop pour les caricaturistes et les autres sont un peu oubliés alors qu'ils ont été tués dans la même folie.
Et puis, les marches blanches n'ont jamais intimidé les pédophiles.
Rédigé par : Le Nain | 12 janvier 2015 à 09:11
Je crois qu'hier ça n'était pas le sujet. Il y a eu un moment indéniable de grâce. Qu'allons-nous en faire ? C 'est toute la question.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 12 janvier 2015 à 12:48
Moi non plus, je n'y étais pas. Comme beaucoup j'étais meurtrie dans ma chair et mon âme par cette exécution monstrueuse. J'ai rendu hommage à ma façon en silence et stricte intimité. Je ne suis pas croyante, je ne suis ni de gauche ni de droite, j'adhère à ce qui me parait juste sans prétendre d'avoir raison.
Je ne pouvais pas y être à cause de la présence de nos politiques et de certains chef d’États étrangers, dont je ne citerai pas les noms.
Rédigé par : Ditch | 12 janvier 2015 à 12:59
Il n'y a pas d'obligation, pas de jugement moral sur les attitudes des uns ou des autres. Mon "j'y étais" n'est ni une posture fiérote, ni un miroir satisfait de mes opinions. Il se trouve que j'ai ressenti une émotion dans cette foule, pas plus, pas moins. J'éprouve très rarement la sensation d'appartenance. Si je devais choisir une communauté, c'est la communauté juive que je choisirais. C 'est ma petite mélancolie perso : j'adorerais être juive. Je suis à l'aise dans l'humour juif, les questionnements juifs, les perpétuelles remises en causes. Chacun sa sensibilité, chacun ses choix, chacun ses joies.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 12 janvier 2015 à 13:21
Les mêmes doutes, les mêmes réserves, les mêmes interrogations .. et puis cette ambiance, cette osmose, cette "communion oecuménique", cette appartenance viscérale, cette joie tragique, cette tristesse heureuse.
J'y étais, et mes neurones, l'espace de quelques heures, ont moins souffert.
Merci à mes concitoyens.
Rédigé par : shimrod | 12 janvier 2015 à 13:39