Le texto me rend de plus en plus perplexe, de plus en plus pensive, à la limite parfois du mal à l'aise. Cette habitude d'écrire au lieu d'appeler ou d'écrire POUR PREVENIR QU ON VA APPELER s'infiltre comme un poison pour casser la spontanéité de la parole. Oh, j'ai pris le train en marche, je textote allègrement. Non, pas allègrement, justement : je textote par mimétisme, par "politesse", rarement par plaisir. Pourquoi, lorsque j'ai envie de joindre des amis, ai-je de plus en plus l'habitude de tomber dans la névrose de la précaution oratoire ? Comme si c'était une muflerie de défourailler son portable sans avoir averti préalablement son interlocuteur... Comment en suis-je arrivée à l'absurdité de dialogues écrits de 15 mn chrono avec des amis ou des gens que je crois des amis ? Suis-je une petite personne tout-à-fait sans gêne si j'avoue préférer les appels directs ? La parole est-elle donc devenue si... Invasive ? Ou l'immédiateté de la vie réclame-t-elle des pauses écrites, des rythmes sourds, de nouveaux codes de respirations ? Est-on une Nabilla si on aime dire "Allo" ? Est-on une cinglée si on préfère la précision du langage à tous les emoticônes de l'univers ?
Moi, j'aime quand on m'appelle direct. Tant pis si je suis occupée. Prends le risque de me déranger, ami(e), j'y vois une affection avant toute chose. Heureusement, avec ma famille on a l'habitude de tirer à vue (appels/appels/appels -déserts de textos). Ce qui amène une autre interrogation : l'appel est-il l'ultime expression de la plus naturelle des intimités ? Pas tout à fait si j'en juge les dring dring de ma banquière et de certains fournisseurs (ceci dit, j'adore ma banquière).
Dans le coton du monde du silence, l'écran s'éclaire : ah, c'est toi.
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