Dans ma matière fétiche, j’étais une bonne élève à l’école. Une très bonne élève, même. Je lisais les LECTURES OBLIGATOIRES avec plus ou moins d’entrain, je les résumais avec soin. Le premier livre auquel je n’ai rien compris fut le Candide de Voltaire. Sa morale me désorienta - pire, me révolta. Enfant cherchant sa place, on me proposait la modestie, l’absence de panache, le calme, la vie douce. Je crois – je suis sure – que ce livre a fait pencher ma balance interne dans le camp des survivants, dans celui de la lutte, du bonheur ostentatoire, du malheur honteux, de la vie vécue comme un trésor volatile, intense et sans merci. J’y ai pensé toute la semaine après avoir regardé le documentaire sur Churchill #France3. Je l’ai regardé toute droite, tendue comme un arc, bouche bée, et devant ses funérailles nationales j’ai… Pleuré. D’émotion. Ce qui m’arrive si peu ! Enfant, pour contrer Voltaire, je me suis bercée de citations gaulliennes et churchilliennes avec un faible particulier pour le dernier héros des Marlborough. Je n’étais pas une adolescente du Che, je n’aimais que les créatures mêlant la plus parfaite des originalités à un fond conservateur. J’aimais les leaders qui gardent, dans leur grandeur, la notion du dérisoire, notion qui les mine, les torture, les fragilise en secret, trouble intelligence sublimant leur charisme. Chez Winston je prends tout. Dans les moments de découragement, je pense à ses débuts de piètre orateur qui travaille son esprit, le fouette pour arriver à la vivacité ; et mon sourire revient ; et l’humeur batailleuse rejaillit, sensible à l’exemplarité.
Je l’ai évoqué en sourdine il y a trois jours avec une Grande Amie (« C’est la guerre, Michel… »). Je l’ai évoqué pas plus tard que ce matin avec un Grand Ami.
A chacun ses réveils-jazz, à chacun ses idéaux politiques, mais, je vous en prie, ne me parlez pas de potager à cultiver, je n’aime que l’amplitude. Suis-je prête à en payer le prix ? Il me semble. Pour s’améliorer, il faut changer. Donc, pour être parfait, il faut avoir changé souvent. CQFD.
Et puis un homme qui a plus de chapeaux que son épouse a quelque chose d’irrésistible : sa mise en scène.
Moi aussi j'ai pleuré toute seule quand les grues du port ont salué sa dépouille,le long de la Tamise. Force et fragilité chez cet homme se mêlant avec tant d'entêtement...
Lire le livre d'Hugo Boris
Trois grands Fauves, portrait de Danton, Hugo et Churchill..
"Trois héros qui ont en commun d'avoir été confronté très tôt à la mort, d'avoir survécu et d'y avoir puisé une force dévorante. Trois survivants qui ont opposé leur monstruosité à la faucheuse"
Je dois dire que c'est le portrait de Churchill qui m'a le plus touché.
Merci Valérie, ton "article" cogne en mon coeur.
Nad
Rédigé par : nadine | 26 octobre 2014 à 16:45
Je crois que voir la mort très jeune donne une grande force. Mais rien ne vaut la force de l'amour. Peut-être est-ce là le secret de l'instinct vital : avoir couru de grands dangers et avoir été aimé dans le même mouvement. Darling Clementine...
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 26 octobre 2014 à 23:26