Pour un seul roman, Tours et détours de la vilaine fille,
Mario Vargas Llosa méritait le Nobel. A celles et ceux qui ne l'ont pas lu : c'est Belle du Seigneur, en beaucoup mieux.
Pour son personnage féminin menteur, mytho, insupportable et attachant, pour la passivité de l'amoureux qui suivra partout la femme de sa vie, sans lasser, sans exaspérer, ce roman est aussi parfait qu'un pas de tango, aussi frappé qu'un bonheur impossible.
Toutes mes félicitations à l'auteur ; que ce Nobel de littérature lui procure longue vie.
En revanche, que penser du livre qui inonde les services de presse : celui des états d'âme de Marilyn, intronisée "femme sensible et intelligente"?
Là, j'ai les warnings de méfiance qui clignottent en continu.
D'abord, parce que la famille Strasberg, qui gère les droits de ce livre, a visiblement besoin d'oseille et qu'elle se refera, une fois de plus, sur le dos de sa plus célèbre élève.
Oh, oui, comme la star aurait été flattée et heureuse de naviguer au rayon littérature ! Mais était-ce vraiment nécessaire ? Marilyn est sans doute la femme la plus aimée par les femmes et les gays. Parce qu'elle possédait, de manière absolue, le don de laisser éclater les souffrances mais aussi les rires de l'enfance dans un corps hypersexué.
Elle reste fascinante à plus d'un titre. Premier constat : tout chez elle respirait la volonté. En premier lieu, celle qui arme la séduction. Marilyn pouvait passer complètement inaperçue, elle pouvait, moyennant perruque, se fondre dans la masse sans être reconnue. Mais quand elle activait sa radiance, ce n'était pas une question de roulements de hanches ou de valseur, elle arrivait, mentalement, à devenir exceptionnelle. Elle savait "se réussir". A quel prix ? Au prix fort.
Les Strasberg, intronisés "gourous", l'ont persuadée qu'elle était une intello faite pour jouer Ibsen. Or ce qui reste son atout le plus beau, c'était au contraire son sens comique de reine. Dans Certains l'aiment chaud, elle parvient, véritable tour de force, à insufler à son personnage vénal toute la suavité, toute la légèreté de la terre ; on ne voit qu'une gamine joyeuse et sentimentale, pas une créature cupide et victimisée.
Tous ceux qui ont approché la femme ont été unanimes, de Mailer à Miller pour dénoncer sa fragilité, ses errances, son intelligence. Quand on prétend "découvrir" une Marilyn brillante, maldonne : être star à ce point-là requiert un maximum de cellules grises, un instinct de tueuse.
Je n'ai aucune envie de saluer ce coup médiatique, ce "beau-livre-de-pensées-profondes-dont-on- garde-les-fautes-d'orthographe-car-la-blonde-était-dyslexique". Je trouve ça juste Midas au petit pied.
Au final, Marylin aura été exploitée jusqu'à la corde, jusqu'à sa plus extrême intimité.
Le seul qui lui ait rendu hommage, vraiment hommage, fut son ex mari Joe Di Maggio.
En refusant tout témoignage "j'ai été le mari de..." (Miller, lui, ne s'est pas gêné), en fleurissant sa tombe chaque année jusqu'à ce qu'il soit six pieds sous terre, en castagnant les journalistes trop curieux et en interdisant au Rat Pack d'assister aux funérailles de sa belle.
Triste ironie : Di Maggio fut pour l'actrice un mari jaloux, violent. Mais il a gagné son rachat grâce à ce silence inflexible et héroïque.
Repose en paix, drôle de femme. Il n'est pas essentiel d'avoir lu Ulysse pour faire ses preuves.
Bravo à Valérie, notre pin up nationale (il n'y pas que M.M. quand même!); beau talent de critique littéraire que ce double hommage
Rédigé par : elek | 07 octobre 2010 à 18:23
TOI ET TOI SEUL a su me redonner envie d'ouvrir un livre. te lire me donne un vrais plaisir donc sans broncher je fonce m'acheter tes recommandations!!! INCONTESTABLEMENT...TOI TOI TOI Mme Ingalls tu est la MEILLEURS....Bisous
Rédigé par : Linda.S | 07 octobre 2010 à 22:04
Chère Valérie, je ne suis jamais décue par les livres que tu nous recommandes... Je vais donc me précipiter à la Fnac la plus proche pour trouver la Mario Vargas Llosa.
Quand à Marylin, elle restera chez le libraire... trop de tintouin médiatique n'est jamais bon signe !
Rédigé par : Armelle | 08 octobre 2010 à 11:21
"Se réussir". Je la vole à l'arrachée.
Rédigé par : fredouat | 08 octobre 2010 à 17:25
suis ds une grande période de générosité, Fred : donné ! (et à appliquer)
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 08 octobre 2010 à 20:51