Il y a qq temps, Piratage(s)
s’interrogeait sur la « fierté d’être Français ». Voir une partie de
cet article ci-dessous :
« Atavisme chauvin
Pourquoi faut-il être fier d’être Français ? Qui veut qu’on le soit et pour quelle raison ?* Difficile de se défaire des oripeaux nationalistes. Tout y concourt, sport, économie, informations, l’esprit de clocher se perche partout. Facile ensuite de stimuler le chauvinisme latent par des déclarations politiques qui glorifient l’appartenance nationale, la grandeur du pays. On abuse de cette grosse ficelle. Mais dès lors, on entre dans le champ paradoxal de la communication, du contorsionnisme émotionnel. N. Sarkozy, grand adepte des emphases patriotiques ne trouve rien à redire à l’envahissement commercial de son bien-aimé pays. Il ne trouve rien à objecter à la mise sous tutelle internationale de sa propre politique par les institutions financières. Bien au contraire, il y contribue, pousse dans ce sens. En l’occurrence, ces contraintes extérieures pourraient être soutenables. Le problème alors se pose sur son obsession de l’Homme étranger. Celui qu’il faut empêcher d’entrer ou stigmatiser s’il réside sur le territoire. Presque une idée fixe dont naitra un ministère. Il est fascinant de noter que le raisonnement inverse s’applique aussi. Pourquoi réclamer la libre circulation des hommes et la régulation drastique des biens de consommation ? Posture absurde finalement, parce que la Nation n’est pas la bonne échelle, ni le bon créneau, ni même le bon critère.
L’irruption au pied de biche des politiciens dans les consciences du citoyen pour y sonder leur “amour du pays” n’est pas anodine. N’est-ce pas simplement une stratégie de diversion ? Une captation des attentions pour masquer les lacunes d’une société axée sur la domination. Souder les citoyens du pays malgré les relations verticales qui les séparent au détriment de l’ émancipation sociale. Dominants et dominés dans le même navire pour bouter l’étranger parasitaire hors de la révérée patrie. Un ciment social sans lequel la société marchande atomisée telle qu’elle s’est installée aurait du mal à se survivre. Le gouvernement Sarkozy a compris depuis son avènement que cet artifice suffirait à camoufler une gestion des affaires calamiteuses. À intervalles réguliers une piqure de rappel est infligée avec la gracieuse collaboration des médias et intellectuels. P. Bruckner, M. Gallo, A. Finkielkraut, I. Rioufol, E. Zemmour et bien d’autres occupent l’avant garde de l’arrogance française. Celle qui derrière une factice repentance creuse le sillon sanglant du rejet de l’autre. Rien n’étant trop beau, ni trop bon pour sa grandeur.
Ce commentaire d’une personne avisée
est EXACTEMENT ce que je pense, mot pour mot :
« Ce qui est surprenant, c’est qu’on reconnait
aux gays le droit d’être fiers de leur condition et de défiler pour elle; aux
personnes de couleurs d’être fières d’être noirs et de le chanter (sing it
loud, i’m black and i’m proud); aux membres de toute minorité régionale
(breton, basque, corse, alsacien) de revendiquer un attachement à leurs
racines; aux africains d’être attachés à leur terre d’origine, et je pourrais
multiplier les exemples. La plupart du temps, ces fiertés là ne sont pas plus
ou moins « méritoires » que l’appartenance à la France, qui serait en
somme le seul chauvinisme condamnable, contestable, suspect,
« moisi ». Emporté par la méfiance (fondée, sans nul doute)
qu’inspirent les tentatives de récupération du concept d’identité nationale par
la droite sarkozienne, nombreux sont ceux qui comme vous « jettent le bébé
avec le bain », et font fi de ce que la France a représenté et représente
comme porteuse de valeurs et de sens à travers le monde (voir comme la
marseillaise, par ailleurs méprisée par bien des français eux mêmes, est
chantée partout où un peuple prétend s’affranchir d’une tyrannie…) Et plus
curieusement encore, ce sont ceux là même qui dénient toute valeur « à
l’identité française », qui sont les premiers à justifier le maintien sur
sol des sans papiers, des clandestins, des réfugiés politiques, en invoquant
tout à coup « la tradition française de terre d’accueil, patrie des droits
de l’homme ». On ne peut pas, en théorie, défendre ces deux postures,
l’une déniant toute valeur intrinsèque à la « francitude », et
l’autre revendiquant « cette identité de terre d’accueil ». C’est
pourtant ce que l’on fait très bien, et sans vergogne, dans de nombreuses
prises de paroles à géométries variables.
Personnellement, je ne suis pas fier d’être français, mais je ne vois pas de
raison d’en avoir honte. En revanche, il m’arrive d’avoir honte de ne pas avoir
compris plus tôt à quel point certains de mes amis « de gauche »,
peuvent être de mauvaise foi quand ça arrange leur discours du moment… »
Merci à Hervé pour ses analyses critiques implicites et
explicites des paradoxes de notre beau pays