Chrono Blues, une histoire moderne
Chose délicate que de donner son opinion sur le livre d'une amie écrivain. On anticipe de part et d'autre. Peut-être des avis gonflés à l'aune de l'amitié ou déformés par la connaissance que l'on a de l'autre ? Et l'autre l'air de rien qui attend de savoir "alors, tu en penses quoi ?". Bon. Stoppons là !
J'ai lu et j'ai aimé Chrono Blues. C'est une histoire moderne et parisienne. Qui se passe dans l'éphémère bruyant des médias, du fric et des beaux quartiers. C'est aussi l'histoire d'une auteur (autrice ?) qui ne peut s'empêcher d'aimer ses personnages. Et quoi qu'elle veuille bien en dire...
L'anti-héros-narrateur est un star du PAF qui déplore son pif ou plutôt les grOSSes rides qui l'encadrent et affaissent son moral ainsi que sa libido. Méli mélo de malbouffe, de divorces, de mégères et de jeunesse enfuie. On pourrait se croire un bref instant chez Wallander, si ce n'était pour les copains branchés et auto-flamboyants et le décor relooké par Jacques Grange plutôt qu'Ikéa.
On croise les inévitables : le fils adolescent, mouligasse et autiste, en prise avec les vicissitudes de la mue. L'ex-femme qui ne supporte pas que ses proies puissent échapper à son emprise ; au centre d'une roue de fiel, une prétendue suicidaire comme toute bonne salope qui se respecte. Le jeune Rastignac qui attend la chute du vieil éléphant pour prendre sa relève dans le théâtre d'ombres. D'autres femmes passent et s'attardent. Sans grand intérêt finalement (la "gentille" m'ennuie mortellement et la "garce" m'indiffère depuis que j'ai fêté mes 24 ans).
On s'amuse beaucoup des Docteurs Frankenstein, Marquis de la seringue, Baron de la meule abrasive. Nouvelle haute aristocratie de l'Horloge auprès desquels riches et puissants courbent l'échine et font antichambre. On s'en amuse d'autant mieux qu'il est si bon de rire "des déboires de son voisin", n'est-ce pas ? (merci Molière).
Le salut viendra de l'accomplissement du désir d'ordre et de routine du petit dernier. Demi-enfant, demi-dieu. Léger comme un plume, qui, sous des dehors d'innocente "Statue du Commandeur", conduira peton à peton son papa consentant vers une fin apaisée sinon heureuse.
Bref, rien ne manque dans cette histoire moderne. Déjà dite et chroniquée en des tas d'autres lieux, essais, chansons, pièces et téléfilms. "Et malgré tout, ces braves provinciaux rêvent encore de Paris et de ses poudres de leds...."
Mais justement, le signe d'un grand écrivain est de savoir raconter une histoire banale, connue de tous, et de nous tenir avec, au point que nous ne pouvons plus lâcher l'affaire (RER, métro, dodo). Sur la ligne 1 notamment, je me suis esclaffée bruyamment (les scènes de thalasso sont uniques). Cela fait de bons moments dans une vie... et des occasions de parler avec des inconnus... par les temps qui courent...
Dès lundi, j'ai prêté Chrono Blues à mon voisin en lui donnant quelques pistes. Non pas l'histoire, mais toute ce qu'elle signifie et "comment elle se lit si bien" (un prodige : moi qui oublie la plupart des détails d'un livre une fois refermé !). Comment elle est très très bien écrite. Valérie Pineau Valencienne possède l'art de la plume. Aucune trahison sur ce front-là.
Et puis, comment lui, étranger francophone et artiste, pourra sans doute décrypter un peu mieux une certaine société française après ça.
J'attends avec un grand bonheur par anticipation le deuxième roman de Valérie Pineau-Valencienne. Qu'elle décide de nous livrer une autre "histoire banale" ou bien une intrigue complexe, nous courons le risque d'une fresque aigre-tendre mais hautement lisible.
ps : un peu réconciliée avec la littérature française actuelle du coup, bénie sois-tu ! :)
N'empêche que le mannequin de chez Lafont est bigrement ressemblant !!! :)
Rédigé par : Cath | 22 janvier 2010 à 20:07
tu peux le dire ! j'ai ri !
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 22 janvier 2010 à 21:13