Coup de foudre à Omotesando
Omotesando, c'est l'équivalent tokyoite des Champs-Elysées. L'avenue des grandes marques de luxe qui rivalisent entre elles à côté des petites mondialisées (je ne compte plus les boutiques L'Occitane au Japon). Sur les deux côtés d'Omotesando, les collines de ce quartier ressemblent plus, en choix commercial, aux abords d'Oberkampf : c'est autour de l'onéreuse avenue que se pressent les petits événements hype (et décevants). Nous avons descendu cette avenue entre pluie de mousson et éclaircies bienvenues, faisant de petits détours sur les collines d'Harajuku. Premier constat : on s'est paumés. C'était le premier jour du voyage, nous voulions croire que nous pouvions nous déplacer sans router. Verdict: c'est quasi impossible. Paradoxe japonais : il est évident de prendre le métro ou le train dont la signalétique est géniale, irréprochable. En revanche, trouver un lieu à Tokyo relève de l'exploit : il n'y a pas de numéros de rues, les adresses étant numérotées selon leur ancienneté cadastrale. Sans compter certaines boutiques ou bars qui sont perchés sur les hauteurs des étages d'une tour. Entre lever le nez et poursuivre la route, la sensation est... Déraisonnable. Max s'était pourtant bien emparé de la ville et refusait de demander le chemin sous peine de passer pour un blaireau. Demander son chemin... Encore un autre exploit, les Tokyoites ne parlant pas l'anglais; ils le baragouinent en ajoutant des o partout, sont incompréhensibles, font régresser mon anglais au niveau CP: quand quelqu'un parle mal une langue, vous avez tendance, même si vous la maîtrisez, à répondre de manière quasi nulle. À Kyoto, c'est heureusement moins vrai: le trésor touristique nippon a sorti les Japonais de leur torpeur linguistique. Mais à Tokyo... Sous les lazzi de Max, je demande ma route une fois (sourires d'incompréhension et main sur la bouche), deux fois... A la troisième, l'homme sollicité s'éclaire et me répond dans un anglais ondoyant, moelleux. "La boutique truquemuche (une enseigne qui est censée venir envahir l'Europe)? C'est par là! D'ailleurs je vous y accompagne ! (Je me fends d'une dizaine de courbettes en bégayant des arigatou frénétiques qu'il écoute à peine.) Ah, Paris, la France... C'est votre PREMIER JOUR à Tokyo? Je vous conseille le bar untel, a Omotesando : c'est le seul authentique, une vraie merveille (arigatou, arigatou...).
Il nous laisse devant le lieu tant cherché, m'envoie un sourire éclatant puis se jette dans mes bras pour le hug du siècle! Je reste pantelante de stupéfaction ; j'avais tellement intégré la gêne japonaise (ne pas regarder quelqu'un en face, ne pas le toucher, pour ne pas le déstabiliser) que je reste muette. Je réponds quand même chaleureusement au câlin -désastre, je venais de fumer un clope-, ultime merci merci merci et il s'en va, comme à regret. Max ricane : "Tout ça pour une boutique de merde ! " Il n'a pas tort... Le futur raz de marée en France est une boutique ultra prétentieuse bas de gamme de fringues en coton, ruineuse pour la qualité et racoleuse quant au design.
Filons, murmure Max, mâchoires serrées.
J'entends une voix française à côté de moi (accent pied-noir assez savoureux) qui jacasse : "Ca va faire un carton en France".
Oui, filons.
Au bout d'Omotesando trône la récompense ultime : le musée Nezu.
Pour la rubrique "que rapporter du Japon", ça sera l'objet d'une prochaine note. 😘
Ps: aucun Japonais ne se jettera dans mes bras par la suite.
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