Un de mes collègues blogueurs, Shimrod, s'intéresse en ce moment aux polars scandinaves. Il demande de l'aide : Mankell? Idridason? Et pourquoi pas s'ouvrir les veines? C'est une tentation assez forte à la lecture de ces mornes tragédies du septentrion. Immanquablement il s'agit de l'histoire d'un quinquagénaire déprimé qui noie sa routine le samedi soir à coup d'alcool fort. Ou d'une inspectrice (parité oblige) blême, débordée, élevant son enfant toute seule après un divorce pénible. L'un où l'autre chasse un toxico-sociopathe-d'extrême-droite-qui-tue-mais-avant-torture-ses-proies-à-coup-d'objets-insolites. Le tout dans des pays où il fait nuit à 14h, où les gens portent d'affreux pulls jacquart qui grattent (commerce éthique), peignent leur porte d'entrée en jaune moutarde - une teinte d'une folle gaieté -, cohabitent dans des unions désastreuses avant de décider une séparation qui les plombera davantage encore. Le tout dans des bois verts-noirâtres, des collines de terre coliqueuse, des lacs sans reflets et des ciels gris métal. Le monde est pourri et on va tous mourir ? Oui. Est-on obligé de subir pour autant les parcours adipeux de pauvres individus? Pas sur.
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J'ai beaucoup aimé Mankell il y a une dizaine d'années. Mais l'époque a tellement surexploité le filon verdasse gothique qu'à présent, je n'en peux plus.
On m'a passé une série (pas encore vue) dont la couverture me désole à l'avance
Ah! Un petit malin (un Finlandais) a tiré son épingle du jeu : lui.
Il a bien compris qu'on en avait assez des couvertures "vite! un prozac pour la route". Il propose, sous couvert de photos amusantes, des livres assez semblables à l'univers de ses collègues du Nord: à nouveau l'histoire d'un pauvre mec affublé d'une harpie qui se demande à mi-vie ce qu'il fout sur terre. Mais Paasilina a un truc : il fait endurer à son loser une série d'incidents qui vont le transformer en scout digne des castors junior. Il n' y a aucune émotion, aucun sentiment amoureux, aucune forme de terreur. Place à l'état euphorique que donne la découverte de la débrouillardise. C'est une théorie qui se vaut, mais attention: trop de Paasilina tue le Paasilina, tous ses livres étant bâtis selon le même canevas dont on se lasse assez vite.
Baisers de la pine'up qui aime la menace sous couvert de soleil
Le polar nordique m'enquiquine, à croire que ces gens là ne savent plus vivre. A part la trilogie Millenium que j'ai dévoré, j'évite les autres qui me dépriment.
Le polar à l'anglaise aussi, arsenic et vieilles dentelles, c'est très peu pour moi.
Le polar à la française m'horripile, il y a toujours un arrière plan politique qui m'énerve.
Mais le polar à l'américaine me plait beaucoup, ça bouge et c'est vivant. Finalement, le polar est le reflet de l'âme des peuples.
Rédigé par : Le Nain | 24 septembre 2012 à 07:48
La littérature américaine actuelle est de toute manière au dessus du lot, polar ou pas. Parce que les écrivains US savent camper des personnages qui sont très éloignés de leur propre univers. Ils peuvent vous parler de la vie d'un peigne-cul du Nebraska (alors qu'ils habitent un quartier bobo à Boston) et vous donner envie d'aller jusqu'au bout de l'histoire. Les Européens sont, pour la plupart, dans une autobiographie déguisée, limités par l'injonction qu'on leur assène : "Parlez des choses que vous connaissez". Les Américains ont bien plus le sens de la liberté d'écriture, d'où leur richesse. Pour Millenium: j'ai arrêté à la moitié du deuxième tome. J'ai trouvé l'écriture très, très académique,le personnage principal d'une rare fadeur, l'intrigue lourdingue - gros Da Vinci Code protestant. Mais: succès mérité car le personnage de la hacker, de loin le meilleur du livre, est assez saisissant. Quant aux polars anglais: je les aime pour leur finesse psychologique, tout en étant d'accord avec vous sur la dentelle; parfois, à force de finesse, l'intrigue se délite et part n'importe où.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 24 septembre 2012 à 11:39
Le troisième de Millénium est, à mon sens, le meilleur. Le procès est très, très bon. Et je suis bien d'accord la hacker (hackeuse ?) est le meilleur personnage, sans lui, il n'y a qu'un polar banal.
Rédigé par : Le Nain | 24 septembre 2012 à 11:55
Vous me raconterez la fin, je n'ai pas la force ni l'envie d'aller au bout.
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 24 septembre 2012 à 17:30
Hello VPV. Merci de cette description éclairée. Je pense, comme toi, aller faire un tour livresque dans des contrées moins lugubres. J'ai entamé "Le sermon sur la chute de Rome" de Jérome Ferrari. Il se passe en Corse. Ca change un peu. Pour l'instant j'y prends beaucoup de plaisir, en particulier au niveau du style superbe et complexe de l'auteur. Je posterai mon avis quand je l'aurai fini.
Rédigé par : shimrod | 24 septembre 2012 à 19:56
Un polar qui se passe en Corse? suis preneuse (by the way pour toi j'ai lu le dernier Nothomb, malin)
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 24 septembre 2012 à 20:04
pas un polar : un essai, intéressant.
Pour nothomb merci du tuyau.
Rédigé par : shimrod | 24 septembre 2012 à 20:59
Si vous voulez un polar scandinave qui ne vous déprimera pas ...
"Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire" de Jonas Jonasson, c'est un polar tout à fait loufoque avec une couverture colorée!
Ce n'est pas de la grande littérature mais cela m'a fait rire tout haut en vacances.
Votre description de la Scandinavie et de ses habitants aussi d'ailleurs ... c'est tellement vrai pourtant!
Rédigé par : mafalda | 25 septembre 2012 à 17:17
Je l'ai dans ma bibole, pas lu encore... vous me donnez envie. Est-ce à nouveau férocement misanthrope? A la lecture de ces ouvrages c'est à croire que tous les Scandinaves mâles sont des pochetrons dépressifs et touts les femelles nordiques des femmes désillusionnées et frustrées. Point de coquetterie ou de galanterie dans les livres des contrées du Nord, au contraire, foison de rapports sexuels hygiénistes et pragmatiques doublés de déprimes en cascades... Faites-moi mentir !!! Parce que c'est en effet une facette du temps qui passe, mais ce n'est pas la seule...
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 25 septembre 2012 à 19:32
ca y est j'ai fini "le sermon sur la chute de rome"
voila mon avis
http://shimrod.typepad.com/blog/2012/09/le-sermon-sur-la-chute-de-rome.html
Rédigé par : shimrod | 26 septembre 2012 à 15:12
pour info :
""Le prix Goncourt 2012 a été attribué à Jérôme Ferrari pour son roman, Le Sermon sur la chute de Rome, paru aux éditions Actes Sud. Le lauréat a été choisi au deuxième tour."
Rédigé par : shimrod | 07 novembre 2012 à 15:07