Compère
capricorne et Talent avec un grand T, permets-moi de jouer à la fée. La Belgique a des gisements de châteaux pour un homme né pour interpréter un des plus célèbres héros outre-quiévrains, à savoir Archibald
Haddock. En voilà un beau rôle à ta
démesure ! C’est donc niché au cœur
des Ardennes belges que je te vois habiter. Je vais enrichir ton patrimoine immobilier :
nom d’un Moulinsart, que penses-tu de cette merveille ?
Il me semble
voir un village en arrière-plan où tu pourras faire tes courses - tu restes un
homme de proximité. Et à celles et ceux qui pensent que tu vas t’ennuyer là-bas,
je PAIERAIS pour passer un dîner avec toi, c’est dire. Il te faudra un Nestor, une Castafiore, un
pote paisible à houppette et une décoration baroque : l’exil se pare de
fastes hugoliens.
Passons à la
décoration et quittons l’abstraction sinistre de ton hôtel particulier
parisien. La bonne dame de Nohant savait recevoir, je t’offre sa salle à manger
Quant au
salon, cessons les simagrées des épures néo scandinaves, vive le velours, les
matières nobles et l’ancien lorsqu’il chahute le moderne.
Pour ta
chambre, une ambiance tropicale ?
Ou une alcove à DVD ?
Des DVD, des
DVD à foison… je te parlerai de mes cinéastes préférés : tout Leo Mc
Carey, tout Raoul Walsh et tout Kazan, tout Preminger,
tout Lubitsch, tout Wilder et tout Mankiewicz.
Une berceuse
pour tes nuits que j’espère heureuses : écoute la plus belle voix féminine
de France et de Navarre te murmurer des complaintes poétiques à toi, plus belle voix masculine de France
et de Navarre.
Une piscine intérieure ?
Je suis en période californienne, je transplante celle de San Simeon chez toi
Une pièce
dédiée aux livres ? La bibliothèque de Chatsworth
Ah oui, un
dernier DVD pour toi : L’homme qui
rit, mais pardonnes-moi de t’offrir la version de Paul Leni (1928), c’est
un des plus brillants films muets, avec un acteur d’exception, au moins
aussi gigantesque que toi et qui s’appelait Conrad Veidt.
Lui aussi n’avait
pas son bac, lui aussi se mouvait avec une grâce de félin. Ah! autre ressemblance, il a laissé son immense fortune à son pays d'adoption (la Grande-Bretagne).
Mylord Gégé,
soi-disant emblématique de ce pays de nazes, si j’en crois les canards
qui titraient : « Gérard Depardieu, Français, donc râleur et de mauvaise
foi. »
Emblématique ?
Pas tant que cela et c’est bien ton ultime paradoxe. Tu ne dois rien à Jules Ferry,
tu n’as pas dû toucher beaucoup d’allocs, tu dois détester te faire rembourser tes
consultations médicales (pas dans ta nature d’ogre, tu n’as pas la fibre
comptable ni le tempérament hypocondriaque d’un Drucker), tu es de bonne foi. Chapeau bas. Tu pars et
tu cries bien haut pourquoi, cela a le mérite de l’honnêteté. Quand Hollande-Zapatero aura poussé le chômage
à 22%, nous verrons qui avait hélas raison.
De Bonne Foi mon Gérard,
contrairement à un lunettier qui s’installe à Londres « mais pas pour des
raisons fiscales », de bonne foi,
mon Gégé, tandis que les journaleux n’ont jamais cillé sur le fait d’avoir des
capitaines de l’Equipe de France de tennis vivant tous en Suisse, de bonne foi – oh oui ! – face à
la chanteuse de banana split qui habite la Belgique « parce que les
Bruxellois sont sympas ». De bonne foi, dans ce pays qui
considère que le diplôme prime sur tout, alors que parfois il peut même être un
frein : être un créatif ou un entrepreneur, c’est avant tout avoir du PIF. J’ai vu des surdiplômés d’écoles de commerce
être nuls en affaires, des khâgneux avoir un sens narratif au-delà de la
platitude et des partis de moins que rien se révéler d’excellents
gestionnaires.
Baisers de
la pine’up qui se sent souvent comme toi, troublant Gérard : hors cadre.
Et pour
ultime cadeau… Non, celui-ci est pour moi.