Je ne sais pas si vous lisez les critiques des nouvelles séries juteuses qui arrivent sur le marché, moi, ça m'arrive. Mais ça va m'arriver de moins en moins avec l'incident d'hier soir : j'étais en effet assez réjouie l'idée de voir sur Arte un nouvel ovni télévisuel qu'on m'avait présenté comme une satire enjouée (désopilante?) et juste sur le milieu des RG époque gaullienne. Les critiques présentaient l'engin comme un travail soigné au niveau des décors dans un style Mad men, et d'un humour assez drôle façon OSS 117. J'ai même lu (ça doit être dans Télérama ou le Monde #RIP) que cette série, hu, petit frisson d'extase, égratignait le Général en REVELANT l'attitude peu reluisante des services secrets de l'époque.
Ouh la... On se réveille, les critiques ? On croit qu'il suffit de coller un acteur jeunot aux traits pointus à la Louis Jourdan ou Jacques Perrin époque Peau d'âne pour faire illusion de candeur, puis de lui faire proférer des idioties d'un ton docte et pof, la foule est pliée de rire ? Tout ça au milieu d'acteurs un poil plus vieux censés ressusciter Paul Meurisse? Et d'actrices glaciales déguisées en poules de luxe rétro? "On" rêve ou quoi?
J'ai rarement, mais alors rarement vu une série aussi nulle de ma vie. Et le pire : je suis sure que le scénariste doit en être conscient (il a planché cinq ans dessus, ça fait peur).
L'intrigue ? pas d'intrigue. Le seul fil conducteur est : faire jouer des acteurs dans des tenues sixties (on rampe derrière Mad men avec 10 ans de retard) en les rendant ridicules et déplaisants. C'est tout.
Figurez-vous que les scénaristes n'ont rien trouvé de mieux qu'une blague autour de "la délégation du Dahomey" pour ouvrir la série; la blague a duré 10 bonnes minutes d'agonie...
C'était affreux. J'avais mal pour les acteurs autant que pour les auteurs. Il manquait juste les pancartes "on dit des trucs racistes mais vous inquiétez pas, c'est pour-rire-de-nous-ha-ha-ha-dans-la-veine humour british ou juif" et encore, il y avait de tels temps de silence, longs, embarrassants, que les pancartes, on pouvait les lire en télépathie pénible et laborieuse.
Pendant ce temps, sur FB, avec les amis virtuels on s'ennuyait tellement que ça donnait ces dialogues :
- Tout tombe complètement à plat.
(ces pauvres blagues auraient peut-être eu un tout petit peu plus d'allure avec un semblant d'intrigue mais je crois que les initiateurs du truc ont craint que le public ne comprenne qu'il s’agissait d'une "critique acide" (misère...)?)
- C'est tellement nul que j ai envie d'émigrer au Royaume-Uni
- C'est le moment de se souvenir qu'Arte est une chaîne franco-allemande. visiblement le département humour est du côté allemand.
Bien. Il est l'heure de revenir aux fondamentaux au lieu de pleurnicher sur l'excellence british. Les scénaristes ont voulu faire rire en se moquant d'eux mêmes ? De toute évidence c'est loupé dans des largeurs abyssales, avec la même malveillance métallique que celle de Balasko adaptant Ab Fab sur les écrans français. Parce que oui, les Anglais arrivent à rendre deux dingos alcooliques et le nez dans la poudre quasi attachantes là où en France, elles piétinent dans une antipathie ennuyeuse.
Et pourtant... OUI, ON SAIT SE FOUTRE DE NOUS AUSSI, chez nos coquelets hexagonaux. Un pays qui a produit Rabbi Jacob, le Corniaud, Le père Noel, Papy, Le Cave.., Un Eléphant, Mes Meilleurs copains et autres comédies sait manier l'ironie, diantre ! Elle sait transformer les odieux en marrants...Pas si loin, la veine comique de Dujardin faisait un OSS parfaitement acceptable...
Un petit conseil : embauchez les deux lascars qui me font le plus rire sur FB (Ungemuth et Burton) et on verra peut-être, je dis bien peut-être une lueur de ravage dans ce paysage bien trop sage.
En attendant je pars dîner avec un air imbuvable dans un restau branché de l'ouest parisien (cling, ceci est l'humour d'hier soir) et si vous voulez du saignant : embauchez-moi. Je me vois tb en Lubitsch déchainé, hurlant à ses scénaristes : "Ce n'est pas pas drôle ! je veux que ce soit tordant !" #Wilder #Brackett #AbonEntendeurSalut
Le peuple français passait pour être le plus spirituel et le plus gai de la terre. Force est de constater que ça appartient au passé.
Rédigé par : Le Nain | 01 novembre 2015 à 02:51
Ce qui est navrant, cher Le Nain, c'est une chose pire que la gaieté perdue : l'insoutenable contentement d'une certaine écriture au service de l'entre-soi. Cet entre-soi qui nous tue
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 02 novembre 2015 à 00:56