S’il y a bien un facteur passionnant dans le commerce de proximité, c’est le contact humain et son cortège de confidences. Cette femme, taillée dans le granit, qui rougit en évoquant ses anciennes amours. Cet homme qui grommèle et s’emmêle les pinceaux avant de bafouiller « qu’il s’agit d’un cadeau pour sa femme (mais de toute façon elle aimera pas)»… Et puis il y a cette phrase lancinante qui ponctue de nombreux échanges : « Ah, j’adore, mais il faut que je demande à mon mari ». Je ne suis pas la seule à l’avoir noté, une fashionista parisienne qui tient un magasin ultra trendy de fringues pour femmes enceintes encaisse la même ritournelle : « Il faut que je demande à mon mari ». Pour un achat de meuble déco, à la rigueur… Mais pour un jean taille large !!! Cela me laisse perplexe.
A part se palucher toute la sainte journée, Ingalls et moi jouissions donc d’une fantastique indépendance d’esprit – ou peut-être est-ce cela, la communion ultime : ne pas avoir BESOIN de demander à son mari.
En attendant, à ceux qui parfois sur le net ou ailleurs semblent croire que les femmes leur piquent tout, job, salaire, enfants et qui pleurent leur virilité perdue, le pouvoir, vous n’êtes pas prêts de le perdre. Un président peut se comporter comme un fumier affectif sans lever un sourcil, peut fourguer son ex au gouvernement sans provoquer de véritable tollé, tout va bien, on demande à son mari.
Une amie m’a suggéré aujourd’hui une hypothèse assez séduisante : contrairement aux pays anglo-saxons, la France n’a pas pu faire de vraie révolution féministe, la révolution française ayant tué dans l’œuf les ardeurs des grandes intellectuelles de la fin du XVIIIe.
Je ne demande pas à mon mari. Je conjugue avec mon mari. Serais-je une nouvelle Mary Shelley, nom d’une créature ?
C'est toujours un plaisirs de te lire ma chère Valérie. Je ne crois n'avoir jamais demandé à mon mari, lui n'ont plus d'ailleurs, ce qui m'a valu d'étranges surprises comme une armure !
Mais tout va changer dans la société, je viens d'entendre à la radio que des stages de repassage sont organisés pour les hommes pour décharger Madame ! Le machisme serait il sur le déclin ?
Rédigé par : Nathalie | 23 mai 2014 à 07:34
J'aime bcp le coup de l'armure. Sinon, je ne suis pas une fétichiste du cadeau parfait, mais j'avoue que "demander à son mari" me met mal à l'aise. Dans la vie, je trouve ça mieux d'assumer les surprises ratées. Des cours de repassage? On en donnait à l'armée, non? Je ne sais pas. Peut-on donner des cours de liberté et de tendresse? Des cours d'empathie?
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 23 mai 2014 à 09:14
Honnêtement, je ne pense pas que la Révolution ait tué les ardeurs des intellectuelles de la fin du XVIIIème. Napoléon a fait beaucoup plus en interdisant tout à la femme dans son code civil, mais le droit romain a beaucoup influencé les auteurs de celui-ci.
Rédigé par : Le Nain | 24 mai 2014 à 07:56
Napoléon découlant de la révolution et le rêve romain étant une constante en mode comme en reste aux abords du XIXe, on n'est pas bien loin (Thermidor nous voilà)
Rédigé par : Valérie Pineau-Valencienne | 24 mai 2014 à 13:28