Parfois, on se demande. On se demande ce qui se passe dans les corps surinformés des gosses. Anecdote : une gamine de 14 ans, en larmes, pleure son chagrin d'amour. Sa mère, inquiète d'un tel ravage, questionne doucement sa fille et apprend de l'ado inconsolable que son copain (même âge) l'a quittée CAR ELLE N 'ÉTAIT PAS DOUÉE POUR LES FELLATIONS. Émois légitimes de la mère, qui a reçu un coup au plexus d'une violence insoupçonnée. Qui faut-il plaindre : la gamine sans repères ? le gamin tordu ? Et je me demande comment parler des choses de la vie à mes propres enfants déjà grandets (18 et 16) en espérant lâchement qu'ils ne soient pas tombés sur des numéros pareils.
La violence quotidienne faite aux enfants, la plus sournoise, la plus basique, rôde là où on ne l'attend pas toujours. Les magazines pornos, dans les kiosques, sont à hauteur de poussette. Je boycotte depuis des lustres une célèbre marque de lingerie bon marché qui propose des strings taille 8 ans. Et je viens de voir qu'il existe un journal de mode spécial mômes de plus (j'ai déjà lu un mensuel nommé Milk
qui ne m'a pas plu), Marie-Claire enfants.
Non, le petit de l'homme n'est pas un petit homme. Et son statut n'est pas de poser, maquillé comme un Pierrot, pour vanter des robes vaporeuses ou des pantalons de mini trader.
Cela va avec la suite, nos gamins n'ont pas à être la proie de nos fantasmes d'apparence, nos idéaux de séduction - nos problématiques d'adultes.
J'en suis à regretter l' ignorance crasse de mes 16 ans qui m'a filé un équilibre salutaire - ou comment ne pas bruler les étapes pour mieux se constituer. Une première fois, bourgeonnante, maladroite, avec un ado aussi manchot que je l'étais a scellé une vision à jamais puissante et épanouie du sexe en majesté ; pas d'initiation - nous étions aussi effarés l'un que l'autre -, pas de soumission (à qui, bon dieu), pas de domination non plus et la certitude que le plaisir est surestimé ds les deux camps - chez les hédonistes comme les religieux : ce n'est ni sacré, ni honteux - c'est bon. Oui, c'est bon, mais pas avec tout le monde, pas n'importe comment, pas à n'importe quelle condition, et pas trop jeune.
Que la sexualité des ados sorte des films de cul me semble une régression sans nom. Que des gamines se croient obligées de considérer cela comme une perf' laborieuse m'effare.
Que l'éveil des sentiments soit anéanti par des considérations techniques me lamine.
Qu'avons nous fait de nos gosses ? Que faisons-nous avec eux ? Pourquoi font-ils cela ?
Baisers d'une pine'up effondrée, qui considère qu'avoir écrit 100 lettres d'amour à son premier petit copain a été qq chose de merveilleux. Et qu'il y ait répondu, aussi.