S'il y a quelque chose que j'exècre, c'est le mépris des élites qui balancent des programmes tv pitoyables sous prétexte de "culture populaire". Non, Patrick Sébastien, ce n'est pas de la culture populaire: c'est de la merde.
La meilleure des cultures populaires, c'est le très bon cinéma; avec sa faculté à entrer tout de suite dans le vif du sujet, son émotion immédiate, ses traces durables dans l'imaginaire comme dans la réflexion.
On va encore dépenser des sommes indécentes dans des programmes scolaires insanes. L'ABC de l'égalité? Autant revoir "L'extravagant Mr Ruggles" et le discours final de Lincoln à Gettysburg déclamé - ou plutôt chuchoté - par Laughton (c'est à voix basse qu'on enchante). Les enfants trop sensibles pour être bien dans leur peau à l'école? un peu de "Thé et sympathie" ou de" Dumbo" ne peut pas faire de mal.
A la place, les malheureux vont devoir endurer des cours d'éducation civique rasoirs et inutiles, des cours d'éducation sexuelle intensifiés qui vont tomber à coté de la plaque, du soi-disant réel mortel.
Je ne m'étonne plus que les meilleurs élèves soient enfants de profs : eux, au moins, sont bien nourris chez eux.
Alors, à défaut de belles lectures, à défaut d'une politique culturelle réduite à peau de chagrin dans un monde gavé de big data, voici une liste de rentrée de films à voir vers 9/10 ans :
- Un Chaplin (celui que vous voulez sauf le dernier).
- Un Renoir (j'ai une tendresse pour Le Carrosse d'or)
- Un Keaton (au hasard Les joies de l'hospitalité ou Les fiancés en folie)
- La mort aux trousses - ce Hitch plait toujours aux gamins.
- Les enfants du Paradis - si on l'aime, c'est une richesse inépuisable.
- Un Disney grande époque (j'hésite entre Blanche Neige, Dumbo et Pinocchio).
- Un John Ford (L'homme tranquille ou La poursuite infernale, idéal pour entrer dans l'oeuvre de ce Shakespeare de la pellicule).
- Gentleman Jim (meme commentaire que celui de Ford pour l'oeuvre de Raoul Walsh).
- Tout Leo McCarey (il y a une respective à la cinémathèque en ce moment, à ne pas rater).
- La vie est belle (Capra)
- The shop around the corner (Lubitsch)
Liste ridiculement petite, mais c'est un bon début pour stimuler sa sensibilité. Au passage, Walsh était un aventurier sans diplomes et Chaplin venait de la rue: voilà de la Grande Culture Populaire venue d'une époque qui ne se moquait pas du peuple et qui ne pérorait pas sur la lèpre populiste. Je glisserais bien aussi un Scaramouche et un Les Trois Mousquetaires de George Sidney, parce que ça a une gueule folle et que mon jeune fils les avait adorés.
A propos de la rétrospective McCarey à la cinémathèque : je n'oublie pas de rendre hommage au travail de Serge Bromberg qui, depuis des années, transmet son virus du cinéma au sens le plus joyeux, le plus émouvant de cet art. Courez le voir transmettre sa passion du cinéma : le bonheur est aussi dans la salle; longue vie à Lobster films, sa société de production qui redonne vie à des pellicules abimées et retrouve les chefs d'oeuvre perdus.
Serge, tu devrais être aussi dans les programmes scolaires, à la place de beaucoup d'apprentissages aussi pesants qu'inutiles. Ta liste de films serait sans doute bien plus fine et subtile que la mienne, mais je tente un petit début de piste à explorer.
Passation, transmission... et rêve.
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