blog de Valerie Pineau-Valencienne

Mange, invité

Si, dans un grand désir de perfection, j’ai pris des cours de cuisine pour sublimer la vie conjugale, force est de constater qu’il n’en reste pas grand-chose (à part savoir faire le foie-gras ce qui est un jeu d’enfant, contrairement à ce que l’on croit). Et si je suis une proie facile pour les idioties télévisuelles de radio-crochet, en revanche jamais je n’ai regardé les topchef masterchef and co qui peuplent la petite lucarne. Ce soir, on reçoit. Pas moi, mais quand même (à propos, l’inauguration de YOK s’est tb passée, les ami(e)s-famille-maire-client(e)s étaient au rdv – les photos vont suivre-merci à toutes et tous-ça-vallait-bien-la-peine-que-je-me-mettre-la-rate-au-court-bouillon).

Que faire pour recevoir un jeune affamé ? J’ai opté pour des cannellonis déjà cuisinés (pas trop le temps), mais pour montrer que la maisonnée n’est pas ingrate, j’ai quand même mitonné mon gâteau au chocolat de belle-mère. 15 mn de préparation pour une standing ovation.

Il s’élabore impérativement avec du beurre salé. Il est fondant. Si on est dans le top ten des gourmands, on ajoute une grosse cuiller de crème fraîche épaisse à coté.

Ah, préparer pour les siens me rappelle l’époque où je passais quatre plombes à faire de succulentes salades pour la fête de l’école… Au début, j’étais mortifiée : quoi, pas de trace de mon taboulé VRAIMENT libanais ( 1 heure pour cisailler des milliers de persil plat) parmi les plats des mères de famille débordées, quiches au fromage suintantes de graisse, salades de riz pas cuit et autre horribles joyeusetés… Les plats les plus géniaux étaient préparés par les mères de famille d’origine maghrébine ; c’étaient les seuls que je goutais entre deux émouvantes barbantes chorales.

Un jour, timidement, j’ai osé dire à la maitresse  :

-         Le pain d’épices au gingembre, il est où ?

-         Celui qui sent si bon ? Qui est bien beige comme il faut ?

-         Euh, oui, c’est moi qui l’ai fait

-         Ne vous formalisez pas, on pensait le garder pour nous, les instits.

Je fus soulagée : j’avais sauvé l’honneur culinaire du pays…

Espérons que ce soir, ce soit le cas…

Dring… Sursaut. Wahou, qu’est-ce qu’il est chouette, cet invité ! Bien élevé et tout… Il y en a une qui a du goût, dans cette maisonnée. 

Petit Flocon

Au chapitre je régresse et après Valérie fait du sport, en ce jour de temps POURRI je me surprends à relire des livres pour enfants. J'ai même séché le marché pour me pelotonner au fond du lit avec 

En fait, c'est un livre horrible qui prone le suicide des vieux, les habitats où toutes les générations vivent à moitié à poil et enduits de graisse de phoque anti-froid, le mariage consanguin, ce qui ne donne pas grande envie de sauver le Groenland de la fonte des neiges (penser à revoir Borgen pour oublier ces clichés). 

Mais cette régression a du bon : demain va être probablement la plus RUDE JOURNEE du mois, aussi la préparer en mode inertie n'est pas idiot. Demain, les amis, c'est la sainte Valérie c'est la fête inaugurale de YOK. Autant vous dire que je ne dors plus depuis quatre jours. 

J'ai le syndrome "bonne élève", vous savez, la fille qui vomit avant chaque composition, qui sort dévastée de chaque devoir sur table en prétendant "qu'elle a tout raté" (et en plus il pleut demain).  

Donc, demain, je vais être livide, courir partout, recompter les boutanches, m'attifer un minimum pour le show et m'exercer au bas mot cinq heures avant  pour trouver un petit mot spirituel et gai à sortir à chacun et chacune. 

Demain, c'est aussi la sainte-Valérie. C 'est con, mais j'y suis sensible. 

J'vais t'exploser la G...!

 

A longueur de blog j'ai exposé ma sainte horreur du sport. N'empêche, l'âge arrivant, la perspective de finir bossue ou déglinguée des jambes me fait prendre conscience d'un minimum syndical de souplesse à acquérir. Ancienne martyre des profs de gym, je suis donc allée à reculons sonner à la porte d'un "coach", psalmodiant sur le chemin Mens sana in corpore sano. Notez que je trouve mon corps très bien; un peu rondouille, mais appétissant, genre petit bébé qui a poussé. J’ai tout de suite mis coach N. au parfum : pas question de maigrir à tout prix (encore que me délester de, mettons, trois kilos de viande ne me déplairait pas totalement), mon idéal esthétique étant calqué sur les années 50 (cheville fine- cuisseau – taille marquée - gros nénés). Coach N. a poussé un soupir de ravissement: enfin une femme entre deux âges pas possédée par le désir d'entrer dans du 36! Je ne m'en vante pas trop, mais depuis environ huit mois, toutes les semaines je fais mon heure d'abdos. En brave élève poussive et consciencieuse. Coach N est parfait : alors que je transpire pour réaliser la moitié d’un écrasement facial, il hurle : « Mais c’est merveilleux ! Bravooo !!! » Et ça marche, j’ai envie de continuer. Depuis un mois, nous sommes passés à la boxe. Cela correspondait à une période durant laquelle j’avais envie de tuer une créature humaine #SacàMerde #Traître #Ordure. Pourtant, je suis à la base une femme bonnasse, pas belliqueuse pour trois sous, genre douce si on excepte un regard parfois trop expressif dans le mépris ou la rage froide. J’ai adoré. Quel défouloir ! J’ai imaginé certaine personnalité politique devant le punching ball, et je m’en suis donné à cœur joie sous les hourras de coach N. Valérie Ali était née. Ce soir, rincée par la journée de boulot et hors de moi contre un ENSEIGNISTE BOULONNAIS ESCROC ET PLUMEUR DE VEUVES (appelez-moi pour avoir le nom, je suis prête à tout pour lui pourrir la vie), j’ai explosé le compteur.

Finalement, la boxe, c’est fait pour les sentimentales. 

Vie

Travailler. Aller chez le médecin la peur au ventre pour le check up annuel. Apprendre, soulagée, que tout va bien, et flotter de fatigue. Travailler. Mon Dieu, si j'avais su à quel point être entrepreneur était dur, je n'aurais sans doute pas tenté le défi. Apprendre à prendre soin de moi. Apprendre à écouter les signaux d'alerte. Partir chez les parents me réfugier pour les fêtes pascales, et laisser naturellement la boutique aux enfants qui savent me prolonger mieux que personne. Regarder The Voice avec une de mes soeurs, et trouver, en se marrant, qu'un petit à grosse voix possède un sacré charisme. Dormir, d'un sommeil lourd, mais empreint d'une tendresse qui revient en moi. Déjeuner avec un commerçant de Boulogne pétri de bon sens. Me friter avec un escroc. Diner avec une superbe amie. Avoir au téléphone un ami potentiel. Faire confiance, puis replonger dans la méfiance. Avoir du sang froid, pleurnicher sur une chanson d'amour. Commencer à se remaquiller. Dévorer les livres. Aller au cinéma voir Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu. Eclater de rire, et retrouver enfin le très grand acteur français qu'est Christian Clavier au sommet de sa forme #rendezvousaveclhistoiresignéMichelTaupin. 

 

Revoir ce film culte? Oh, ça va, je l'ai déjà regardé 1000 fois 

Mémoires de taulière

 

Chapitre 1

Chevillée désormais à ma ville de Boulogne pour cause d’ouverture d’un commerce, j’ai décidé de parler… de ses habitant(e)s par le prisme de YOK.

Ma tendresse va vers les vieilles dames poétiques. Elles entrent timidement, poussées par les couleurs. On tape la discute. Certaines possèdent des trésors qui n’intéressent pas leur descendance (vases Gallé…). Cheveux neigeux, regard un peu voilé, elles trottinent, toutes mignonnes, si frêles qu’on a envie de les prendre dans les bras. Il y a aussi les fantaisistes babyboomers. Fières et altières, elles ne font pas attention aux modes. Elles ont découvert Courrège dans les années 60, Agnès B dans les années 70 et ne veulent ressembler à personne. Elles ont l’œil aguerri et savent ce qu’elles veulent. Il y a les architectes – souvent des hommes - qui viennent uniquement pour le volume d’un meuble, pour sa « coupe ». Ils sont fonctionnalistes, modernistes, cherchent l’utilité avant la beauté de l’accessoire.

Et puis il y a les grandes émouvantes. Comme cette femme qui achète, petit à petit, en mettant ses sous de coté, un tabouret design. Elle a beaucoup moins de moyens que les autres, elle réfléchit très longuement. Elle n’est pas timide -  elle se concentre. Elle vient d’acquérir enfin sa maison A ELLE après avoir travaillé longtemps dans celle des autres. Alors question gout, on ne la lui fait pas. Elle peut rester des minutes entières, immobile, à réfléchir. Puis, d’une voix assurée, elle se décide. Je me retiens d’applaudir son choix ; elle a le sens inné de la couleur.

Enfin, il y a l’adorable. Le sens de la couleur, elle ne l’a pas. Elle aime le vieux rose…, oui, mais elle se sent un peu perdue. Elle demande gentiment de l’aide. Elle est si humble que je me mets en quatre pour elle.

Pour finir : les amoureux. Les jeunes, les vieux.

Celui qui débarque :

-         Votre fauteuil, là, il peut supporter 100kg ?

-         Même 200 !

-         Ah, il me plait bien… j’attends que le gouvernement rentre de vacances, et on revient vous voir.

J’ai parfois tendance à surestimer l’humanité et à être déçue par sa mesquinerie, alors des journées avec le sourire des autres, ça fait plaisir.  

 YOK

 

 

L'appel du marché Escudier

J'ai toujours aimé "faire" le marché. Sans doute mon côté terrien et nourricier. J'aime y aller avec des ami(e)s ou en solitaire. Et j'aime faire des efforts d'élégance pour traverser les allées, parfois à la stupéfaction des citadins en jogging. Jour du Seigneur n'est pas relâche. 

Apaisants, les étals jonchés d'asperges du printemps. Apaisantes, les premières fraises. 

Fédérante, la foule épanouie dont je fais partie. Souriante, ma gracieuse amie. 

Si je suis incapable d'adhérer à des principes platement bourgeois (ou bobos, c'est la même chose), je n'aime pas pour autant la marginalité. Le marché m'attendrit, des colosses qui déchargent les camions aux pères déguisés en rugbymen de luxe accompagnant leur marmaille en trottinette. Ou cette femme drapée dans son manteau informe, traits tirés - je soupçonne un samedi de fête.  

Et ce vieil acteur bon pied bon oeil, casquette vissé sur le crâne, enguirlandant comme à l'accoutumée le fruitier :"t'as déjà des tomates? On n'est pas en juillet, hein, elles sont forcément farineuses!"

Le café des épaves qui picolent dès 8h, et que je fuis, détestant cette addiction. La librairie où je vais acheter le sacro-saint JDD. Puis je me pose au Lutécia où le patron chinois me sert dans la langue d'Audiard un café serré. Avec toutes les familles abonnées au café serré. 

Alors, je me sens heureuse. 

Bravo à Brigitte Joffraud

 je sais ô combien il est difficile de faire un retour sur soi pour parler d'une maladie. Nous partageons Brigitte et moi la même, l'épilepsie, et je m'aperçois à travers les nombreux témoignages que je lis sur les réseaux sociaux combien il est urgent, essentiel et vital pour les gens qui en souffrent qu'ils puissent se retrouver dans les difficiles parcours du combattant. Il est tout aussi essentiel que les gens qui ignorent cette maladie apprennent que ce n'est pas une "pathologie", mais une maladie neurologique. Que ce n'est pas une maladie mentale, mais qu'elle peut, à cause de l'ostracisme qu'elle génère, provoquer des troubles du comportement chez certains êtres devenus encore plus malades de solitude que malades physiquement. 

Je ne suis plus à même de parler de l'épilepsie, étant guérie depuis une quinzaine d'années.

Place à la nouvelle, et à son courage.

Bonne chance, Brigitte !